Longtemps considérée comme une expression culturelle et identitaire, la musique ntcham suscite aujourd’hui la controverse. Certains concitoyens l’accusent d’alimenter les tensions sociales et la violence chez les jeunes, tandis que d’autres défendent son rôle de miroir d’une réalité souvent ignorée.
Née dans les quartiers populaires de Libreville selon certains acteurs urbains et en prison selon d’autres, la musique ntcham puise sa source dans les réalités urbaines pour exprimer les frustrations, les rêves et les colères d’une jeunesse en quête de reconnaissance. Ses textes crus, parfois provocateurs, traduisent un vécu marqué par la précarité et les inégalités sociales. Derrière ces rythmes entraînants se cachent des messages forts qui sont la dénonciation du chômage, de la corruption, ou encore appel à la solidarité communautaire.« La ntcham est notre moyen d’exprimer les réalités de nos quartiers » a déclaré Lastava chanteur de ntcham en herbe
Mais depuis quelque temps, les paroles de certains artistes sont pointées du doigt. Des titres incitant à la vengeance, glorifiant les affrontements entre bandes rivales ou normalisant la consommation de drogues inquiètent les populations. « Les jeunes tendent à s’identifier aux figures charismatiques de la Ntcham (artistes, danseurs) qui incarnent »la réussite des quartiers ». Autrement dit, lorsqu’un artiste évoque des défis de la rue, des agressions ou des trafics, certains jeunes peuvent percevoir cela non seulement comme un constat, mais comme un modèle d’action ou un horizon possible. » a révélé Francky-Thiburse Mapenda, diplômé en sociologie à l’Université Omar Bongo (UOB).
Les défenseurs de la Ntcham rappellent qu’il s’agit d’un exutoire artistique, comparable au rap ou à la dance hall, où la parole brute permet d’évacuer la colère et de dénoncer les injustices. Les consommateurs de ce style de musique affirment que c’est pour eux un moyen “réveiller les consciences”, et non de les inciter au désordre.« Psychologiquement, la répétition des messages valorisant la « bagarre », la « prise de risque » ou l’illégalité peut désensibiliser à la violence, réduire l’empathie, accroître la tolérance à l’agressivité. » a souligné le sociologue.
Cependant, certaines personnes reconnaissent que la recherche du buzz pousse parfois à la surenchère verbale et à l’esthétique de la violence. « Lorsque des paroles musicales décrivent la violence comme un réflexe de survie ou un moyen de reconnaissance, cela peut altérer les normes morales d’un jeune en quête d’identité » a affirmé Francky-Thiburse Mapenda.
Au-delà de toutes les critiques dont est sujet la musique ntcham, qu’on l’aime ou qu’on la redoute, elle s’impose aujourd’hui comme un puissant révélateur des tensions sociales contemporaines et vise à s’imposer au-delà de nos frontières afin que « la Ntcham domine le monde ».

