Chaque édition de la Coupe d’Afrique des Nations est l’occasion pour les fans de football gabonais de vibrer pour leur équipe. Mais derrière l’euphorie des stades et des retransmissions télévisées, un phénomène inquiète de plus en plus : l’explosion des paris sportifs, en particulier en ligne, qui touche essentiellement les jeunes.
« La CAN, tout comme les championnats européens et autres, sont les moments où les applications de paris explosent », explique Blaise Nzoundou, sociologue. « Les jeunes sont happés par la promesse d’argent facile, souvent sans mesurer les risques financiers et psychologiques associés ». Smartphones en main, ils misent sur les scores, les buteurs, parfois sur des combinés complexes, espérant transformer leur passion pour le football en gains rapides.
Pour beaucoup, les paris commencent comme un simple divertissement. Mais la frontière avec l’addiction est mince. « Au début, je pariais juste pour m’amuser avec les amis. Mais très vite, j’ai commencé à perdre régulièrement, et à vouloir rattraper mes pertes. Certains soirs, je ne dormais pas pour suivre tous les matchs et les cotes en direct », confie Kevine, jeune compatriote.
Les conséquences sont multiples. Financièrement, de nombreux jeunes se retrouvent endettés auprès de leurs proches ou empruntent à des intermédiaires informels, parfois peu scrupuleux. Psychologiquement, la frustration et le stress liés aux pertes peuvent provoquer anxiété, découragement et isolement social. Pour certains, le jeu devient une priorité sur les études ou le travail, aggravant des problèmes déjà existants.
Les experts alertent sur l’absence de cadre légal strict au Gabon concernant les plateformes de paris en ligne. « Les jeunes n’ont pratiquement aucune protection. Il n’existe pas de limites de mise, ni de campagnes de sensibilisation adaptées. Le phénomène progresse quasiment sans contrôle. », souligne le Dr. Mireille Ndong, psychologue. Aucun contrôle n’est réellement exercé sur les mises, les bonus ou les limites d’âge, laissant le champ libre à des pratiques addictives et parfois frauduleuses.
Pour Blaise Nzoundou, la solution ne passe pas seulement par la répression, mais par l’éducation et la prévention. « Il faut montrer aux jeunes que la passion pour le football peut se vivre sans que cela devienne un risque financier ou social. Sensibiliser tôt, intégrer le sujet dans les discussions scolaires et familiales, voilà les outils les plus efficaces ». Pour endiguer ce phénomène, les experts plaident pour une approche préventive et éducative : campagnes de sensibilisation, formation des parents, encadrement dans les écoles, régulation stricte des plateformes et suivi des comportements à risque
Alors que la CAN 2025 bat son plein, le football continue de rassembler, de passionner et de faire rêver. Mais derrière les buts et les chants, un défi sérieux se profile : protéger une jeunesse qui pourrait se perdre dans le jeu, là où elle cherchait seulement le plaisir de soutenir son équipe.

