Utilisant réseaux sociaux, forums et messageries pour intimider, menacer ou ridiculiser, le cyberharcèlement prend une ampleur préoccupante au Gabon, comme ailleurs dans le monde. Ce phénomène fait des ravages, notamment chez les jeunes, plus vulnérables et exposés via les médias sociaux. Les conséquences sur la santé mentale et le bien-être des victimes peuvent être dévastatrices.
« Le cyberharcèlement est aujourd’hui un véritable facteur de désorganisation psychique, en particulier chez les adolescents, mais pas seulement. Nous observons une recrudescence de plaintes liées à des interactions numériques toxiques, vécues comme traumatisantes », alerte Mawele Mbembou Hynnel Verley, psychologue clinicien et psychopathologue.
Face à cette menace grandissante pour la santé mentale des citoyens, des mesures s’imposent. « Ce harcèlement n’est pas juste une série d’insultes. C’est une atteinte à ce que Didier Anzieu appelle le Moi-peau, cette frontière psychique qui protège notre identité », explique Mawele Mbembou. « Quand on est humilié sur Facebook, TikTok ou via des groupes WhatsApp, ce Moi-peau est lacéré, et la personne se sent psychiquement nue, exposée et sans défense ». Il est donc impératif que les autorités sensibilisent la population à ces dangers et renforcent l’arsenal législatif pour protéger les victimes et sanctionner les auteurs.
On oublie souvent que les mots peuvent blesser plus profondément que les coups. Ces douleurs invisibles peuvent mener à la dépression, voire au suicide. Elisia, victime, témoigne : « Quand j’étais au lycée, des camarades m’ont prise en photo et l’ont postée. Les commentaires étaient si méchants que je n’osais plus aller en cours ni même sortir de chez moi. J’étais devenue l’objet de moqueries de gens que je ne connaissais même pas ». Ce type d’expérience traumatisante explique pourquoi certaines victimes en viennent à vivre recluses, pour échapper à la haine véhiculée par des personnes cachées derrière leurs écrans.
Il est aussi essentiel de comprendre les motivations des harceleurs. Certains sont eux-mêmes d’anciennes victimes reproduisant un schéma de défense. « Souvent, derrière le cyberharcèlement, on retrouve un mécanisme de projection. C’est-à-dire que le harceleur projette sur autrui ses propres fragilités, son insécurité, sa faiblesse, son besoin de contrôle, parfois sa propre douleur non résolue », analyse le psychologue.
Somme toute, il apparaît fondamental que parents, éducateurs et professionnels de la santé mentale collaborent étroitement pour accompagner les jeunes victimes, les aider à surmonter les séquelles émotionnelles et prévenir de nouveaux cas.
Le cyberharcèlement est un problème majeur pour la société gabonaise, exigeant une action immédiate et coordonnée de tous les acteurs. Il est urgent de prendre des mesures concrètes pour protéger les plus vulnérables et mettre un terme à ce fléau insidieux qui peut détruire des vies.