La chasse aux « fonctionnaires fantômes » dans l’administration publique gabonaise connaît un coup d’accélérateur spectaculaire. Le scandale des 756 agents fantômes au ministère de l’Éducation nationale, qui percevaient indûment un salaire sans être à leur poste, n’est qu’un exemple parmi d’autres qui démontre le rôle fondamental du numérique comme outil puissant d’audit, de traçabilité et de la lutte anti-corruption.
Pendant plusieurs années, le phénomène des agents fantômes a prospéré grâce à un système de gestion des ressources humaines (GRH) lacunaire, caractérisé par la primauté du papier et la fragmentation des données. Le numérique impose un cadre strict Fichier Unique de Référence (FUR), il s’agit de la base de l’intégrité administrative.
En forçant la centralisation des données de tous les fonctionnaires dans une seule base (l’archive numérique centrale), on rend quasiment impossible l’existence de dossiers parallèles ou fictifs. « Malgré l’ère du numérique, l’administration gabonaise maintient des méthodes de contrôle archaïques et manuelles », a indiqué Memiaga Magloire, secrétaire général par intérim du syndicat de l’éducation nationale (SENA). Selon ce dernier, c’est précisément ce défaut de contrôle numérique qui permet l’existence des agents « fantômes » et favorise les abandons de poste.
L’interconnexion des systèmes pourrait limiter toutes ces failles. Il s’agirait de lier les bases de données des ministères afin que toutes les modifications dans le dossier numérique d’un agent soient horodatées et attribuées à un utilisateur spécifique. Cela permet de retracer la chaîne de validation frauduleuse et d’identifier les complices internes (DRH, Services de la Solde) ayant permis le maintien des « fantômes » sur la liste.
Dans une récente déclaration vidéo, le ministre de l’Économie numérique, de la digitalisation et de l’innovation, Mark-Alexandre Doumba, a récemment décliné un concept afin de pallier cette situation. « L‘interopérabilité est l’une de nos grosses innovations de notre réforme dans le cadre de notre ordonnance sur la digitalisation, comme une obligation intégrée dans notre texte », a-t-il indiqué.
L’objectif de cette réforme n’est pas seulement de numériser des documents, mais de faire en sorte que tous les systèmes d’information de l’État puissent communiquer entre eux de manière sécurisée et fluide. Par ailleurs, le fait de remplacer les circuits papiers physiques et les échanges de main à main par des plateformes en ligne sécurisées réduit les occasions de corruption « pots-de-vin, commissions » pour accélérer un dossier.
In fine, la digitalisation est la feuille de route de l’État gabonais pour le XXIe siècle, visant à transformer une administration traditionnellement bureaucratique en une administration agile, transparente et au service du développement durable. En assainissant le fichier, le numérique permet de connaître les besoins réels en personnel. L’État peut alors recruter de vrais enseignants pour l’Éducation Nationale ou de vrais médecins pour la Santé, améliorant directement la qualité du service public.