À Libreville, Akanda ou Owendo mais également dans certaines localités du Gabon, la scène est devenue banale : aux heures de pointe, trouver un taxi relève parfois du parcours du combattant. Si la hausse du prix des pièces détachées, l’encombrement routier ou encore la fatigue des conducteurs sont souvent évoqués, un autre facteur, plus insidieux, fait parler de lui : le racket policier.
Sur certaines artères de la capitale, notamment les zones stratégiques comme Charbonnages, IAI, PK12 ou le front de mer, les contrôles policiers sont devenus pour les taximen une source constante d’angoisse. Si le contrôle en lui-même est légitime, son détournement à des fins pécuniaires s’apparente à un fléau quotidien. Des amendes improvisées, des « cafés » exigés sans reçu, ou encore des immobilisations abusives : nombreux sont les chauffeurs qui préfèrent contourner ces zones, quitte à réduire drastiquement leur circuit et, par ricochet, l’offre disponible.
« Moi, je ne passe plus au rond-point de Nzeng-Ayong après 15h. Là-bas, tu peux finir ta journée sans rien mettre dans la poche, juste à force de « dépanner. Je préfère rouler sur des trajets plus longs mais tranquilles », témoigne J.M, taximan depuis huit ans. Pour lui comme pour d’autres collègues, le racket est devenu une véritable entrave au travail.
Face à cette réalité, le ministère de l’Intérieur, de la Sécurité et de la Décentralisation semble vouloir durcir le ton. Dans une adresse ferme aux forces de police, le ministre Hermann Immongault, s’est voulu clair. « Porter l’uniforme engage. Être policier, c’est servir la loi dans le respect des lois. C’est garantir la sécurité sans jamais abuser de son autorité. La Cinquième République appelle à une police irréprochable, visible, professionnelle et exemplaire », a-t-il déclaré le 19 mai 2025 lors de son discours aux forces de l’ordre.
Un message salué par une partie de l’opinion, qui y voit un signe d’espoir. Mais sur le terrain, les taximen restent prudents. Beaucoup disent attendre une véritable traque des abus et des sanctions exemplaires pour ceux qui salissent l’uniforme. « Ils doivent avoir des gilets avec leur numéro matricule, ou les noms. Comme ça en cas de contrôle abusif, on peut les identifier et même dénoncer », souligne, C.P, un conducteur de taxi.
Alors que le Gabon cherche à restaurer la confiance entre citoyens et forces de l’ordre, la question du racket mérite d’être traitée comme un enjeu national, tant elle impacte la mobilité urbaine, le moral des chauffeurs et l’économie informelle. Car si les taxis disparaissent des routes, ce n’est pas toujours par manque de volonté, mais parfois simplement pour fuir un système devenu oppressant.