Créé pour représenter les collectivités locales, le Sénat gabonais se présente comme un pilier de la démocratie. Mais derrière ce rôle institutionnel, certains s’interrogent : cette chambre haute dispose-t-elle d’un réel pouvoir ou n’est-elle qu’un outil politique au service du pouvoir exécutif ?
Mis en place en 1997, le Sénat avait pour mission de compléter l’Assemblée nationale et de donner une voix aux collectivités locales. Inspiré des modèles parlementaires occidentaux, il devait équilibrer les pouvoirs et consolider une démocratie encore fragile. Plus de vingt-cinq ans plus tard, l’efficacité de cette mission reste toutefois mitigée.
Des pouvoirs importants mais limités
Théoriquement, le Sénat partage le pouvoir législatif avec l’Assemblée nationale : il peut examiner, amender et adopter les projets de loi, tout en disposant de moyens de contrôle sur l’action gouvernementale. « Le Sénat agit rarement en opposition aux orientations du gouvernement, ce qui limite sa capacité à jouer un rôle de contre-pouvoir effectif. », a affirmé Arnaud Lilian Billie, politologue. Son président joue un rôle clé en assurant l’intérim à la tête de l’État en cas de vacance, comme ce fut le cas après le décès d’Omar Bongo en 2009. Dans la pratique, cependant, l’Assemblée nationale conserve le dernier mot en cas de désaccord, limitant l’influence réelle de cette chambre haute.
Entre vitrine institutionnelle et outil d’équilibre
Pour une partie de la classe politique, le Sénat conserve une utilité : il représente les collectivités locales et donne à la démocratie gabonaise une image de pluralisme. Pour d’autres, il sert surtout à récompenser des alliés ou à apaiser les tensions régionales. « Cette représentation est souvent diluée par les logiques partisanes et les nominations présidentielles, qui peuvent affaiblir l’ancrage territorial des sénateurs» a souligné le politologue. Ainsi, le Sénat oscille entre symbole républicain et instrument au service du pouvoir.
Vers un renouveau après la transition
À la suite de l’élection présidentielle qui a conduit à la victoire du président Brice Clotaire Oligui Nguema, la loi n°020/2025 du 27 juin 2025 et porte le Sénat à 70 membres. Cette réforme vise à renforcer sa représentativité, mieux refléter la diversité des provinces et moderniser son fonctionnement. Conformément à l’article 35 de la Constitution, ses membres sont élus au suffrage universel indirect. « Ce qui devrait garantir une certaine proximité avec les réalités locales », a renchéri le politologue.

