Les déclarations ce mardi 11 novembre 2025 au palais de Justice de Libreville, de Jordan Camuzet, ancien collaborateur personnel de Noureddine Bongo Valentin, lèvent le voile sur l’ampleur du pouvoir et du patrimoine du fils de l’ancien président gabonais. Entre gestion directe d’intérêts économiques, acquisitions immobilières à l’étranger et influence sur les hautes sphères administratives, le témoignage de cet homme de confiance apporte de nouveaux éléments à l’enquête judiciaire visant le clan Bongo.
Dans sa déposition, Jordan Camuzet se décrit comme un “homme à tout faire” au service de Noureddine Bongo Valentin, qu’il assistait dans la gestion quotidienne de ses affaires privées et professionnelles. Il explique que ce dernier agissait comme un détenteur réel de l’autorité présidentielle, convoquant lui-même des responsables administratifs et des personnalités publiques, sans passer par les circuits institutionnels.
Selon Camuzet, le fils du président s’exprimait et agissait avec un sentiment d’impunité totale, fort de son statut de « fils du chef de l’État », s’imposant comme un acteur central dans la gestion du pouvoir et des ressources du pays.
Un patrimoine tentaculaire à l’étranger
Les déclarations de Jordan Camuzet confirment l’existence d’un patrimoine considérable détenu par Noureddine Bongo hors du Gabon. Le témoin cite notamment : deux propriétés à Londres, entretenues par une dizaine d’employés permanents, une villa à Rabat, au Maroc et une résidence à Dubaï, aux Émirats Arabes Unis.
La gestion de ces biens, selon Camuzet, était entièrement centralisée et financée depuis le Gabon. Les dépenses d’entretien, les salaires du personnel et même les émoluments de Camuzet lui-même auraient été pris en charge par le Trésor public, transformant ainsi les ressources de l’État en instruments de gestion du patrimoine privé du clan Bongo.
Une image maîtrisée et un comportement calculé
Interrogé sur les rumeurs entourant la vie privée de Noureddine Bongo, Jordan Camuzet affirme n’avoir jamais observé de consommation de stupéfiants ou de substances illicites, démentant ainsi certaines allégations sur son mode de vie. Il décrit un homme méthodique, autoritaire et soucieux de contrôler son image, bien éloigné du portrait parfois excessif véhiculé dans l’opinion publique.
Une transaction foncière d’envergure à Nkok
L’un des points les plus marquants de la déclaration de Jordan Camuzet concerne une opération foncière majeure liée à la zone économique spéciale de Nkok.
Selon le témoin, il aurait signé au nom de Noureddine Bongo des documents relatifs à une transaction portant sur un terrain de 110 hectares, évalué à plusieurs dizaines de milliards de francs CFA. L’affaire aurait impliqué la société Gabon Special Economic Zone (GSEZ), sans que les conditions exactes de la transaction ne soient clairement établies.
Cette révélation renforce les soupçons sur une possible utilisation de la puissance publique à des fins personnelles, Nkok étant un pôle industriel stratégique bénéficiant d’importants avantages fiscaux et d’un statut d’exception au sein de l’économie gabonaise.
Un témoignage à fort impact judiciaire
Le récit de Jordan Camuzet éclaire la manière dont Noureddine Bongo Valentin exerçait une autorité parallèle, mêlant pouvoir politique, contrôle administratif et enrichissement privé. Il révèle également une confusion systématique entre les ressources de l’État et les intérêts familiaux, à travers des pratiques de financement opaques et une gestion centralisée de biens étrangers.
Ce témoignage s’ajoute à celui de Kim Oun, ex-assistant de Sylvia Bongo, confortant l’hypothèse d’un système organisé et hiérarchisé autour du duo mère-fils, aujourd’hui au cœur des poursuites pour détournement de fonds publics, blanchiment et abus de biens sociaux.

