Au Gabon, l’école ne se limite plus aux salles de classe. De plus en plus, elle se joue aussi dans les foyers, où certains parents, par excès de zèle ou méconnaissance du cadre pédagogique, s’érigent en juges des méthodes éducatives. Si la collaboration entre parents et enseignants est indispensable à la réussite des élèves, l’ingérence constante de certains géniteurs tend aujourd’hui à fragiliser l’autorité des enseignants et, par ricochet, la qualité même de l’éducation.
Dans plusieurs établissements, le constat est récurrent : un élève sanctionné pour indiscipline, une mauvaise note, une remarque jugée sévère… et aussitôt, les parents interviennent. Certains se présentent à l’école pour exiger des explications, d’autres n’hésitent pas à menacer ou à insulter le corps enseignant, estimant que leurs enfants sont victimes d’injustice. Ce comportement, loin d’être marginal, alimente un climat de tension et de défiance au sein de la communauté éducative.
« Nous ne pouvons plus corriger ou recadrer un élève sans craindre une réaction du parent », confie un enseignant d’un établissement public de Libreville. Selon lui, cette tendance remet en cause le principe fondamental de l’éducation : celui de l’autorité bienveillante. L’enfant, témoin de ces confrontations, en ressort souvent conforté dans l’idée que l’enseignant peut être contredit, voire humilié. Résultat : la discipline s’érode, le respect se perd et l’apprentissage devient un combat permanent.
Pourtant, le rôle des parents devrait être complémentaire, non contradictoire. Les spécialistes de l’éducation insistent sur la nécessité d’un dialogue constructif entre les deux parties. « Quand un parent conteste chaque sanction ou remet en cause les méthodes pédagogiques, il envoie à son enfant le message que la responsabilité est toujours ailleurs », explique une psychopédagogue. À terme, cela nuit à la formation du sens de l’effort, de la rigueur et du respect des règles.
Ce phénomène révèle également un malaise plus profond : la perte de confiance dans le système éducatif. Face à des classes surchargées, des enseignants parfois démotivés et un encadrement insuffisant, certains parents estiment devoir reprendre la main. Mais sans repères clairs, leur intervention, souvent émotionnelle, s’apparente davantage à une ingérence qu’à un partenariat éducatif.
L’école gabonaise a besoin de cette alliance, mais une alliance équilibrée, où chacun joue son rôle. Les parents doivent accompagner sans interférer, soutenir sans substituer. Les enseignants, eux, doivent redoubler d’efforts pour communiquer, expliquer, rassurer. Car au final, l’objectif est commun : former des citoyens responsables, respectueux et conscients que l’éducation ne se construit pas dans la confrontation, mais dans la coopération.

									 
					
					