A LA UNE

    Procès Bongo Valentin : fin des auditions au sixième jour d’audience

    15 novembre 2025

    Gabon : 18 membres du gouvernement démissionnent, neuf ministres assurent l’intérim dans l’attente du remaniement

    15 novembre 2025

    Auditions sous haute tension : révélations en cascade dans l’affaire Bongo Valentin

    14 novembre 2025
    Catégories
    • A la une
    • Afrique
    • Gabon
    • Monde
    • Non classé
    • podcast
    • Top news
    • Top news
    • TRANSITION
    • Video
    A LA UNE
    • Procès Bongo Valentin : fin des auditions au sixième jour d’audience
    • Gabon : 18 membres du gouvernement démissionnent, neuf ministres assurent l’intérim dans l’attente du remaniement
    • Auditions sous haute tension : révélations en cascade dans l’affaire Bongo Valentin
    • Procès Bongo Valentin : premières auditions sous un climat électrique
    • Mondial 2026 : les Panthères s’arrêtent aux portes du rêve, le Nigéria impitoyable
    • Gabon : clap de fin pour l’Assemblée nationale de la transition après 25 mois d’exercice
    • Gabon : laisser les enfants chez leurs grands-parents, nouvelle forme de démission parentale ?
    • Gabon : 4 402 milliards de FCFA détournés, un scandale au cœur des inégalités sociales ?
    Gabon24Gabon24
    • Accueil
    • Gabon
    • Afrique
    • Monde
    • TRANSITION
    Gabon24Gabon24
    Accueil » Gabon : réquisitoire du Procureur Général Eddy Minang lors du 2ème jour du procès Bongo Valentin
    A la une

    Gabon : réquisitoire du Procureur Général Eddy Minang lors du 2ème jour du procès Bongo Valentin

    Gabon 24Gabon 2412 novembre 2025Aucun commentaire219
    Facebook Twitter LinkedIn WhatsApp Email
    Procureur Eddy Minang
    Share
    Facebook Twitter LinkedIn Email WhatsApp

    Réquisitoire du Procureur Général MINANG

    Affaire MP C/ Sylvie Marie Aimée VALENTIN ép. BONGO et Nourreddin BONGO VALENTIN :

    Dans la vie des peuples, il vient toujours un moment où l’histoire exige une rupture avec les dérives, l’injustice ou l’impunité.

    Ce moment est arrivé.

    Ce procès en est l’expression la plus éclatante.

    La Justice est la base de la société, disait ARISTOTE. 

    Aujourd’hui, la Justice doit parler.

    Et quand la Justice parle, c’est le droit qui perle.

    Non pour se venger, mais pour rétablir la vérité.  Non pour humilier, mais pour reconstruire. 

    La Justice ne parle ni avec la voix de la haine, ni avec celle de la vengeance. Elle parle avec la voix claire et grave du droit, de l’équité et de l’égalité.

    Et cette voix doit rappeler à tous, fût-on prince ou reine d’hier, que nul n’est au-dessus de la loi, et que le bien public n’est pas un héritage, mais un dépôt sacré.

    Ce procès n’est pas un exutoire politique. C’est celui du mensonge, de la confiscation du pouvoir, et de la promotion du vice. 

    Ce procès n’est pas celui de la famille BONGO ONDIMBA. 

    Mais, des BONGO-VALENTIN.

    En effet, il est celui de Nourreddin BONGO VALENTIN, ancien coordonnateur général des affaires présidentielles- autrement dit le numéro de la République – et de Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, ancienne Première Dame du Gabon.

    Celui d’un duo, qui avait tristement travesti, lamentablement subverti, l’exercice du pouvoir suprême, depuis l’AVC du président Ali Bongo Ondimba, en Arabie Saoudite, 

    Celui d’un duo, culturellement éloigné du Gabon, selon leurs dires, mais pécuniairement très proche du Gabon. 

    Ce procès n’est pas un procès spectacle.

    Mais, le procès de la politique spectacle incarnée par de futiles courses de bateaux, un carnaval de danseuses brésiliennes presque nues, la destruction de la Cité de la Démocratie pour deux parcours de golf à 4 milliards de FCFA, des dunes du sable le long du bord de mer, des inutiles conférences du New York Forum Africa dont chaque édition a coûté au contribuable en moyenne 5 milliards FCFA et j’en passe.

    Ce procès est celui de nos silences d’hier.

    C’est le procès de la gabegie, de la concussion et de la corruption.

    Voilà le visage du désastre moral et politique dont ce procès porte la trace. 

    Mais, ce jour n’est pas seulement celui du jugement des accusés. Il est également celui d’un peuple qui se redresse. Celui d’un Gabon qui choisit la vérité, la transparence et la dignité.

    Ce procès est un serment collectif :

    qu’aucune Première Dame, 

    qu’aucun proche parent,

    ne s’arrogera plus jamais un pouvoir que seul le peuple confère.

    Ce procès me renvoie à La mort de Sardanapale, de DELACROIX où l’excès se consume et la parure devient ruine.

    Monsieur le Président,

    Mesdames et Messieurs,

    Les espoirs du peuple gabonais sont immenses.

    Espoir que demain, enfin, la République soit plus juste.

    Espoir que la Justice parle, et qu’en parlant, elle nous libère.

    Monsieur le Président,

    Mesdames et Messieurs,

    A titre préliminaire, j’entends faire des observations. 

    Après celles-ci (I), seront successivement exposés les étapes de l’enquête préliminaire et de l’information judiciaire (II), le règlement de la procédure (III), les faits ainsi que les débats (IV) l’appréciation morale, financière et sociale du procès et enfin, les réquisitions sur la culpabilité et le quantum des peines (V).

    • OBSERVATIONS LIMINAIRES :

    Ces observations portent sur les prétendues violations des droits des accusés, sur la présence des autorités judiciaires à la Villa Nam et, enfin, sur la régularité de ce procès.

    1. Sur les prétendues violations des droits :

    Les violations soulevées par les avocats des deux accusés concernent la violation des droits de la défense, les détentions arbitraires et les tortures physiques.

    1. Sur la violation des droits de la défense :

    Les droits de la défense impliquent le droit d’être assisté et d’être représenté par un avocat. Ils visent à assurer l’égalité et la loyauté entre les parties et à contrôler la régularité de la procédure. 

    L’examen des pièces du dossier laisse apparaître que depuis la première comparution jusqu’à l’ordonnance de règlement, Nourredin BONGO VALENTIN et Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, ont été assistés par leur avocate.

     Cette dernière a assisté à tous les interrogatoires de ses clients et communiquait avec eux. Certains interrogatoires s’étaient même déroulés dans une ambiance bon enfant telle que l’illustre une vidéo enregistrée dans le cabinet d’un juge d’instruction. 

    Je tiens à préciser, dans ce dossier, cette avocate attaquait systématiquement toutes les ordonnances juridictionnelles ainsi que les arrêts de la Chambre d’accusation. Au total, elle a initié une douzaine de recours (appels et pourvois en cassation réunis). 

    Il en résulte que ses clients ont été bien assistés et défendus et leurs droits n’ont nullement été bafoués.

    1. Sur les détentions arbitraires :

    Nourreddin BONGO VALENTIN et Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, prétendent que leur détention était arbitraire étant donné que d’une part le Juge d’Instruction n’avait pas recueilli, au préalable, les observations de l’avocat et celles du Ministère Public, telles qu’édictées par l’article 133 du CPP et d’autre part, le juge d’instruction avait statué le 11ème jour alors que l’incarcération provisoire ne doit pas excéder 10 jours.

    S’agissant de la détention de Nourreddin BONGO VALENTIN, par arrêt daté du 31 octobre 2023, la Chambre d’Accusation a estimé que « les exigences prescrites par l’article 133 du CPP avaient bel er bien été respectées ».

     

    Quant à celle de Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, la Cour de Cassation du Gabon a démontré, par arrêt du 25 février 2025, que le juge d’instruction avait fait une juste et exacte application de la loi en ce que l’article 662 in fine du code de procédure pénale précise que lorsque le délai expire un dimanche ou un jour férié, celui-ci est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant à 24 heures.

    Dès lors, en m’appuyant sur ces décisions ainsi que l’article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, il en résulte que ces détentions sont légales car elles ont été ordonnées par une autorité compétente, suivant une base légale et dans le respect des droits procéduraux des accusés. 

    1. Sur les tortures physiques : 

    Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, et Nourredin BONGO VALENTIN, soutiennent avoir également été torturés physiquement par leurs geôliers et qu’ils détiendraient des preuves. Depuis lors, la vidéo de ces tortures tarde à être publiée.

    Dans le cas où ces preuves existeraient, j’instruirai l’ouverture d’une enquête car je condamne les différentes formes de tortures.

    Toutefois, j’ose espérer qu’il ne s’agirait pas de montages de preuves des violences conjugales dans le huis-clos de la villa Nnam. En effet, une ancienne conversation, aujourd’hui authentifiée, entre Sylvia BONGO ONDIMBA et sa belle-fille Malika, dévoile des propos glaçants. Sylvia confie y avoir été battue par Ali Bongo, à tel point qu’elle déclare : « Si Noureddin avait été là, il aurait tué son père. » (pièce 1)

     Un aveu douloureux qui lève le voile sur une intimité familiale marquée par la peur et la terreur.

    1. Sur la présence des autorités judiciaires à la Villa Nnam :

     

    Une vidéo montrant M. Ali BONGO, sa femme et son fils ainsi que d’autres personnes a cristallisé des passions et suscité des commentaires acerbes et des lives abjects. Certains, par aigreur ou en mal de visibilité, se sont permis d’exploiter cette vidéo à des fins de désinformation et de dénigrement. 

     

    D’autres, des syndicalistes en mal de notoriété et des activistes en mal de visibilité, se sont érigés en donneurs de leçons sans maîtriser ni les codes républicains ni la procédure pénale. 

     

    Ce qui frappe c’est la facilité avec laquelle une mère et son fils qui ont régné sans partage sur ce pays tentent de se faire passer comme des victimes d’un système qu’ils ont, pourtant, façonné.

     

    Oui, nous nous étions déplacés au domicile de l’ancien Président Ali BONGO ONDIMBA. Notre présence consistait uniquement à notifier les conditions de sortie du Gabon après la mise en liberté provisoire, ordonnée pour raisons médicales, et à rappeler les obligations qui sous-tendent cette mesure. 

     

    Ces obligations étaient contenues dans un protocole qui devait être signé d’accord parties entre l’Etat gabonais représenté par le Directeur Général de l’agence judiciaire de l’Etat d’un côté et de l’autre, l’ancien Chef de l’Etat et sa famille. 

     

    Et c’est à ce titre, que le Directeur Général de l’agence judiciaire de l’Etat, qui n’est pas un magistrat, avait pris, seule, la parole pour expliquer les termes de cet accord. 

     

     Pour ma part, trois raisons principales justifiaient ma présence au domicile de l’ancien Président :

    • les ordres de mise en liberté avaient été signés par mes soins ;
    • je représente le Ministère Public et selon les articles 32 du CPP et 79 de La loi organique n° 8/2019 du 4 juillet 2019 fixant l’organisation, la composition, la compétence et le fonctionnement des juridictions judiciaires, c’est le Ministère Public qui veille à l’exécution des décisions de justice.

     

    • Ali BONGO est un ancien Chef de l’Etat, qui mérite des égards.

     Je précise que le CPP, en son article 511 du CPP, accorde les mêmes égards au Premier Ministre et aux membres du gouvernement. En effet, dans le cadre d’une procédure pénale, la loi autorise le Premier Président de la Cour d’Appel à se déplacer au domicile d’un PM ou d’un membre du gouvernement pour recueillir sa déposition. 

     

    S’il n’y avait que Mme BONGO et son fils, nous ne nous serions pas déplacés. Au-delà, ce qui me choque dans cette vidéo, c’est le manque de compassion de Sylvia à l’égard de ses proches ou employés. Elle ne pense pas à eux. Ce qui l’intéresse, ce sont ses meubles, ses effets personnels et le fait qu’elle n’ait plus un milliard à faire sortir de sa poche. Un milliard !!!!!

     

    Enfin, je voudrais rappeler que la diffusion ces vidéos, enregistrées clandestinement et visant à faire pression sur la justice et à émouvoir l’opinion publique, est punie, selon l’article 288 du code pénal, d’un emprisonnement de cinq ans au plus et de 10.000.000 de francs d’amende au plus.

     

    1. Sur la régularité de ce procès :

     

    Les avocats de Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, et de Nourredin BONGO VALENTIN ont prétendu que ce procès ne devait pas se tenir pour trois raisons majeures à savoir le non-respect des procédures de citation et des délais de route, l’existence d’un pourvoi en cassation et la non communication des dossiers puis ils ont utilisé des qualificatifs inadmissibles tels que « procès indigne », « simulacre de procès » et « procès tronqué ». 

     

    Je tiens à rappeler que la liberté d’expression de l’avocat présente une amplitude variable selon qu’il intervient dans le prétoire, dans le prolongement du prétoire et hors du prétoire. 

    En effet, lorsque l’avocat s’exprime en dehors de l’enceinte du palais de justice, il n’est plus protégé par « l’immunité de la robe ». Il devrait donc veiller à ne pas dépasser certaines limites tenant au respect de l’institution judiciaire et aux règles déontologiques.

     

    S’agissant du premier point relatif au non-respect des délais de route, je voudrais préciser qu’après avoir bénéficié de la liberté provisoire, Mme Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, et son fils, Nourreddin BONGO VALENTIN avaient élu domicile à la villa « Nam », sise à la Sablière, dans la commune d’Akanda. 

     

     L’élection de domicile est le choix d’un lieu que fait une personne pour les besoins d’une procédure ou pour l’exécution d’un contrat. Elle emporte pouvoir de recevoir toute notification dans le lieu qui y est désigné. En raison de leur absence au domicile, les avis d’audience ont été remis à un parent conformément à l’art. 422 al. 2 du CPP : « si la personne à citer est absente de son domicile, copie de l’exploit est remise contre émargement à un parent, allié, employé ou à une personne résidant à ce domicile ou encore à un voisin ». 

     

    Il en résulte que les délais évoqués à l’article 419 du CPP ne sont pas applicables car il n’y a jamais eu changement de domicile élu.

     

    En outre, ils prétendent avoir formé un pourvoi en cassation le 2 ou le 3 juillet 2025. Le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire permettant de contester une décision rendue en dernier ressort pour violation de la loi, vice de procédure, ou excès de pouvoir. 

     

    Toutefois, l’article 465 du code de procédure pénale indique : « lorsque le dossier est en état, le greffier le transmet au Ministère Public de la juridiction qui a statué et celui-ci l’adresse immédiatement au Procureur général près la Cour de Cassation ». 

     

    Je n’ai jamais reçu aucune transmission dans ce sens.

     

    Enfin, elle a osé déclarer que l’entier dossier n’avait pas été mis à sa disposition. Pourtant, tous les dossiers ont été transmis au secrétariat du Barreau. Si elle voulait obtenir une copie, il lui suffisait simplement, comme l’ont fait ses confrères, de s’adresser à M. le Bâtonnier. 

     

    Mme Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, et son fils tentent de réécrire l’histoire en se présentant comme des victimes et crient à « l’injustice », à la « manipulation judiciaire ».

    Pourtant, lorsqu’elle était Première Dame, elle faisait confiance en la Justice de notre pays. 

    Le témoignage, hier, d’une jeune compatriote, incarcérée injustement et le courrier, versé au dossier, et adressé à la mère de cette dernière l’illustre parfaitement. 

    Aujourd’hui, cette même Mme Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO refuse le droit à cette même Justice de s’exprimer. 

    Où était-elle et son fils lorsque ZIBI Bertrand croupissait en prison pour avoir osé dire non publiquement ? 

    Où était-elle et son fils lorsque Jean-Rémy YAMA, Marcel LIBAMA, Landry WASHINGTON et autres subissaient des traques, humiliations et arrestations arbitraires ? 

    Où se trouvait cette justice tant réclamée aujourd’hui lorsque Nourreddin avait refusé à Jean-Rémy YAMA d’aller simplement s’incliner sur la dépouille de son épouse ?

    Où étaient-ils lorsque BLA avait été enfermé 4 ans durant dans une pièce, sans promenade, sans lecture et avait comme seule ration journalière le pain et la sardine ? 

    Où étaient-ils lorsque les familles endeuillées réclamaient justice pour leurs enfants assassinés au QG de M. Jean PING ?

    Où était la séparation des pouvoirs lorsque Mme Sylvia BONGO avait fait convoquer le Procureur de la République de Libreville Olivier NZAHOU, en 2019, dans le cadre de l’affaire Wally pour exiger que ce dernier publie le mandat d’arrêt d’Alexis NDOUNA sur les réseaux sociaux en violation des dispositions légales ?

    Où était la séparation des pouvoirs lorsque Nourreddin BONGO VALENTIN avait fait convoquer, à son domicile, ce même procureur de la République, le 21 novembre 2019, afin qu’il procède aux arrestations de Brice LACCRUCHE ALIHANGA, Tony ONDO MBA, Renaud AKOUE ALLOGHO et Patrichi TANASA pour détournement de fonds publics. 

    Et, pour avoir simplement exigé une plainte de l’État contre les intéréssés et ce, conformément à la jurisprudence WADA, Nourreddin BONGO VALENTIN avait fait venir de Londres, le lendemain, son père convalescent pour tenir un Conseil Supérieur de la Magistrature extraordinaire à l’issue duquel ce Procureur avait été relevé de ses fonctions. Le Président avait fait repartir le même jour pour soins.

    Le Peuple n’a pas oublié.

    La République n’a pas de mémoire courte.

    II)- SUR L’ENQUÊTE PRELIMINAIRE ET L’INFORMATION JUDICIAIRE :

    Le 4 septembre 2023, le Directeur Général de l’Agence Judiciaire de l’État, adressait au Procureur de la République près le Tribunal de première Instance de Libreville une plainte contre Nourreddin BONGO VALENTIN, Ian Ghislain NGOULOU, Mohamed Ali SALIOU, Abdul OCENI OSSA, Jessye ELLA EKOGHA, Steeve NZEKO DIEKO et Cyriaque MVOURANDJIAMI pour association de malfaiteurs, détournement et complicité de détournement de deniers publics, blanchiments de capitaux, faux et usage de faux et concussion.

    Par soit-transmis daté du 15 septembre 2023, le Procureur de la République saisissait la Direction générale de la Contre Ingérence et de la Sécurité militaire et, quelques jours après, la Direction Générale des Recherches pour enquête.

    Les investigations menées par les enquêteurs aboutissaient à l’interpellation d’autres personnes dont Jordan CAMUSET, MOMBO Gisèle Yolande, KIM OUN et OTHA NDOUMBA Gabin. 

    A l’issue des enquêtes préliminaires, une information judiciaire était requise contre toutes ces personnes pour détournement et complicité de détournement de fonds publics, corruption active, concussion, faux et usage de faux, contrefaçon des sceaux de la République, contrefaçon d’imprimés officiels, usurpation de titre et de fonction, trouble aux opérations d’un collège électoral, association de malfaiteurs, blanchiment de capitaux et complicité de blanchiment de capitaux. Ces faits sont prévus et punis par les articles 48, 49,101-1, 112-3, 115, 117, 127, 133, 141, 165, 193, 194 et 380 du code pénal.

    Inculpés puis interrogés au fond respectivement, ils niaient plus ou moins les faits à eux reprochés. 

     

    En cours d’information, une information était requise contre AMOUSSOU Jean Denis pour faux et usage de faux et association de malfaiteurs, Gabin OTHA NDOUMBA pour complicité de détournement de fonds publics, détournement de fonds publics, destruction de documents professionnels et association de malfaiteurs et une autre, contre Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO pour faux et usage de faux, blanchiment de capitaux et recel. Inculpés puis interrogés à leur tour, ils niaient également les faits.

     

    Sur les 13 personnes inculpées, 9 étaient incarcérées, 3 assignées à résidence et une laissée en liberté provisoire.

     

    En date du 27 septembre 2023, le Juge d’Instruction rendait une ordonnance aux fins de gel des avoirs bancaires des sus nommés. Le 29 septembre 2023, le conseil de Nourreddin BONGO VALENTIN relevait appel de ladite ordonnance. Le 31 octobre 2023, la Chambre d’Accusation confirmait l’ordonnance querellée.

     

    III)- SUR LE REGLEMENT DE LA PROCEDURE :

     

    Clôturant cette information judiciaire, le magistrat instructeur rendait le 10 avril 2025 une ordonnance de non-lieu, de non-lieu partiel, de requalification et de transmission des pièces au Parquet Général.  

     

    Après la notification de cette ordonnance aux parties, l’un des avocats de la défense, Me EYUE BEKALE Gisèle, agissant pour le compte de ses clients Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, et Nourreddin BONGO VALENTIN, attaquait le 14 avril 2025 cette décision. 

     

    Dans ses conclusions d’appel, elle soulevait la nullité de cette ordonnance de règlement en se fondant sur deux moyens à savoir l’absence de son nom sur l’ordonnance querellée et du résumé sommaire des arguments de la défense.

     

    Le 30 juin 2025, la Chambre d’Accusation rejetait ledit recours étant donné qu’elle n’avait « exposé aucun préjudice » résultant de ces omissions puis renvoyait devant la Cour criminelle de céans les nommés Nourreddin BONGO VALENTIN, Ian Ghislain NGOULOU, Mohamed Ali SALIOU, Abdul OCENI OSSA, Jessye ELLA EKOGHA, Steeve NZEKO DIEKO et Cyriaque MVOURANDJIAMI Jordan CAMUSET, MOMBO Gisèle Yolande, KIM OUN et OTHA NDOUMBA Gabin Gabin OTHA NDOUMBA Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO pour répondre des faits à eux reprochés. 

     

    En raison de la disjonction des procédures, mon réquisitoire de ce jour portera sur les deux personnes absentes. 

     

    Les ordonnances de prise de corps n’ayant pas été exécutées, Nourreddin BONGO VALENTIN et Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO sont considérés comme étant en fuite. Ils seront donc jugés selon la procédure de contumace. Du latin « contumacia », qui signifie obstiné, rebelle, la contumace est l’état d’un individu, accusé d’un crime, qui ne comparait pas car l’ordonnance de prise de corps n’a pu être exécutée ou parce qu’il ne s’est pas présenté à la suite de la notification qui lui en a été faite à domicile. 

     

    Il est jugé en son absence et sans le concours des jurés, en application de l’article 257 du code de procédure pénale. 

     

    La décision qui y est rendue n’est ni une condamnation définitive ni une justice rendue dans le dos d’un accusé, mais une mesure de continuité laissant toujours ouverte la possibilité d’un nouveau jugement si le contumax se présente ou est arrêté.

     

    Leur absence volontaire, par la contumace, renforce la gravité de leur attitude face à la justice.

     

    Ils ne fuient pas un procès : ils fuient la vérité.

     

    1. IV) – SUR LES FAITS 

    • Sur les faits reprochés à Nourreddin BONGO VALENTIN :

     

    Sur le détournement des fonds publics :

     

    Aux termes de l’article 141 du code pénal, le détournement s’entend de la soustraction par un fonctionnaire ou un agent de l’Etat de deniers publics dont il était dépositaire à l’occasion de ses fonctions. 

     

    En l’espèce, il est reproché à Nourreddin BONGO VALENTIN d’avoir commis le crime sus visé.  

     

    Cependant, il nie avec force les faits mis à sa charge en soutenant, par la plume de son conseil, Me EYUE BEKALE Gisèle, dans ses écritures du 3 juin 2025, qu’il ne pouvait détourner des fonds publics car il n’était ni un dépositaire de l’autorité publique, ni chargé d’une mission de service public, ni un comptable public. 

     

    L’examen des pièces du dossier laisse apparaître que durant près de deux ans, du 5 décembre 2019 au 13 septembre 2021, Nourreddin BONGO VALENTIN a exercé les fonctions de Coordonnateur général des affaires présidentielles.

     

    Sa mission consistait, selon le décret de nomination, « à assister le Président de la République dans la conduite de toutes les affaires de l’Etat et à veiller à la stricte application de ses décisions ». 

     

    A ce titre, il percevait du Trésor Public un salaire de 2.900.000 FCFA CFA et une prime mensuelle de 500.000.000 F CFA. Dans ce cas, il était dépositaire de l’autorité publique car il était investi « dans l’exercice de ses fonctions, d’un pouvoir de décision et de contrainte par délégation de la puissance publique » (Crim. 21 mai 1997, 96-82.904).

     

    En dépit de sa démission, intervenue en septembre 2021, il a continué à poser des actes de puissance publique liés à la fonction de Coordonnateur général des affaires présidentielles comme l’ont attesté Mohamed Aliou SALIOU et Jessye ELLA EKOGHA.

     

    Selon Mohamed Aliou SALIOU, Nourreddin BONGO VALENTIN avait « continué non seulement à donner des ordres à tous les collaborateurs directs du Chef de l’Etat mais aussi il organisait les réunions par vidéo zoom et en présentiel, dans les bureaux qu’il occupait en tant que Coordinateur général des affaires présidentielles et lors de ses passages au Gabon, il recevait même des Ministres, Directeurs Généraux de l’administration publique (PV d’enquête préliminaire, feuillet n° 02/03). Quant à Jessye ELLA EKOGHA, il précise que « sa démission ne l’a pas empêché de garder les mêmes prérogatives et de continuer à donner les ordres par le biais de Ian Ghislain NGOULOU et de Mohamed Ali SALIOU » (PV d’enquête préliminaire, pièce n°02, feuillet n° 01/10). 

     

    C’est en cette qualité, qu’il avait instruit le décaissement de la somme de 49 milliards de francs CFA pour créditer les comptes bancaires Mpougou et Logistiques 2.3 inscrits dans les livres de la banque BGFI respectivement de 46 et de 3 milliards. 

    Le bordereau de cette opération, retrouvé lors de la perquisition effectuée à son domicile, est versé au dossier.

     Dans le même sens, il avait instruit le Directeur Général du Trésor et de la Comptabilité Publique de créditer régulièrement le compte de la société dénommée Sana Invests pour le règlement des salaires et primes de ses employés.

     Or, selon le répertoire numéro 1077 de l’étude GEY BEKALE, cette société, créée le 26 février 2013, avec un capital de 100 millions, a pour actionnaires Sylvia BONGO ONDIMBA, Ali BONGO ONDIMBA, Nourreddin BONGO VALENTIN, Jalis Louis BONGO ONDIMBA, Bilal BONGO ONDIMA, Christophe VALENTIN et Christèle AHOLOU. Elle est gérée par Christophe VALENTIN ONDIMBA et détient le compte UGB n ° 90000563596-07. Ce compte, ouvert en août 2020 est alimenté par des virements de 550. 000.000 FCFA et 300.000.000 FCFA provenant de son compte BGFI. 

    Cette même société a viré, en 2013, à l’école Ruban Vert plus de six milliards à partir de son compte BGFI n° 41017912011-35. Sur le compte de cette école, 2. 066. 264. 550 FCFA ont été envoyés à la société Consulting House Factory et 1. 296. 800.000 FCFA ont été virés sur un autre compte de l’école Ruban Vert. Il apparaît que le compte de la société Sana Investment est un compte de passage.

     

    En effet, le 18 avril 2023, 200.000.000 FCFA ont été virés sur le compte de la société Sana Investment et le 24 avril 2024, ces fonds ont été envoyés sur le compte de l’école Ruban Vert.

     

    Lors de son interrogatoire au fond II, le 23 avril 2024, Nourreddin Edouard BONGO VALENTIN a précisé que la société SANA Invest détient des actions « dans l’Ecole Ruban Vert, Wally Ressort et Mayena Groupe » (PV). Par ailleurs, il a reconnu, d’une part, avoir reçu tous les mois du Trésor Public « entre 500.000.000 FCFA et 1.000.000.000 FCFA » et que ces sommes étaient virées dans un compte à pseudo à BGFI BANK (PV d’enquête préliminaire, feuillet n° 02/06).

    Mieux, Jordan CAMUSET a soutenu qu’il était chargé d’aller récupérer auprès du Trésorier Payeur Général des devises dont le montant minimum était de 100.000 euros à chaque fois que Nourreddin BONGO VALENTIN voyageait (PV d’enquête préliminaire, pièce n°2, feuillet n° 01/02).

    Pour justifier ces décaissements colossaux du Trésor Public, Nourreddin BONGO VALENTIN soutient qu’il exécutait les instructions du Président Ali BONGO ONDIMBA. Toutefois, il n’a pas pu en rapporter la preuve.  

    De même, il n’a pas pu produire le fondement juridique qui lui permettait de percevoir les différents bonus pétroliers, les virements mensuels du Trésor Public oscillant « entre 500.000.000 FCFA et 1.000.000.000 FCFA » ou de faire payer ses différents employés par le Trésor Public à travers la société Sana Investment.

    Monsieur le Président,

    Mesdames et Messieurs,

    Il résulte des éléments du dossier, des rapports d’enquête de l’Agence nationale des Investigations financières, des procès-verbaux d’audition et des pièces comptables versées aux débats, que d’importants flux financiers, émanant du Trésor public et de l’administration présidentielle, ont été extraits de leur destination légale pour être utilisés à des fins strictement personnelles.

    L’information judiciaire a établi l’existence d’un système d’ordres de paiement, de notes internes falsifiées et de décaissements irréguliers exécutés sur instructions directes de Nourreddin BONGO VALENTIN. 

    Ces instructions ne reposaient sur aucun texte réglementaire ni aucune décision budgétaire, mais sur des ordres informels transmis à BGFI et à UGB pour le compte de la Présidence de la République.

    Les relevés bancaires démontrent que ces « primes » ou « fonds de souveraineté » ont transité vers des comptes familiaux ou affinitaires, notamment le compte joint Ali/Sylvia BONGO à la BGFI Bank, les comptes SCI Martin-Pêcheur et SCP Yssia, ainsi que les comptes Ambowe Nomba et SANA Investments, tous alimentés entre 2017 et 2023 par des montants dont la nature publique est établie.

    L’analyse chronologique des virements met en évidence une récurrence mensuelle de ces perceptions indues :

    • 2. 000 000 000 F CFA en date du 7 juillet 2017 ;
    • 136. 500 000 F CFA le 10 février 2020 ;
    • 850. 000 000 F CFA sur le compte SANA Investments entre 2020 et 2023 ;
    • et des flux annuels cumulés dépassant 58 milliards de F CFA entre 2018 et 2022.

    Ces sommes ont été comptabilisées comme « dépenses de représentation » ou « appuis institutionnels » dans les livres du Trésor public, mais ont, en réalité, servi à des acquisitions de nature privée : mobilier de luxe, bijoux, dépenses domestiques, travaux immobiliers et voyages personnels.

    Ces différentes sommes, identifiées par l’Agence nationale d’investigation financière à hauteur de 2. 901. 101. 005. 264 FCFA au 30 août 2023, proviennent notamment :

    – des fonds de souveraineté et fonds spéciaux de la Présidence ;

    – des sociétés Logistique 2.3, Média Volontaire et SEGS, toutes deux alimentées par le Trésor Public ;

    – et de sociétés publiques et parapubliques.

     

    Ces fonds de souveraineté ou spéciaux, bien que non budgétisés, sont de nature publique car ils provenaient du Trésor Public et devaient servir pour le bien public. 

     

    La matérialité du détournement résulte de la soustraction effective des fonds publics des circuits de l’État de leur emploi contraire à la loi, pour l’acquisition de biens personnels (immeubles, aéronefs, titres de sociétés) ou le paiement de dépenses personnelles et de la traçabilité directe des virements issus de comptes publics vers les comptes des prévenus ou de leurs prête-noms.

    Ainsi, l’information judiciaire a révélé que les sommes issues du Trésor Public étaient ensuite transférées, par virements internes ou par espèces, vers des comptes bancaires personnels, comptes affinitaires ou sociétés civiles immobilières (SCI) servant de véhicules de transit. Plusieurs de ces structures – notamment les SCI Martin-Pêcheur, Lilya, Paradic, Ambowe Nomba, SCP Yssia, West 1 Jay et Mars – ne présentaient aucune activité économique réelle.

    Les témoignages recueillis corroborent cette architecture.

    Ainsi, M. Saliou MOHAMED ALI, ancien Directeur de Cabinet adjoint du Président de la République, décrit un circuit de financement parallèle, dirigé par M. Noureddin BONGO VALENTIN, dans lequel les ressources du Trésor étaient mobilisées au profit de dépenses électorales et personnelles.

    1. Abdul OCENI OSSA précise que l’avocat Alain MALEK était le réel architecte de l’évacuation et du blanchiment des fonds au Gabon ou reçus à l’étranger via des opérateurs pétroliers tels que PERENCO.

    Ces flux financiers ne relèvent ni d’une négligence, ni d’une erreur administrative. Ils témoignent d’une intention délibérée de détourner la richesse publique à des fins personnelles. Cette intention délibérée se déduit du caractère systématique, organisé et transnational des mouvements constatés.

    Dans ce dossier, le détournement de fonds publics constitue ici l’infraction-source de l’ensemble du dispositif criminel. 

    Cette infraction est le point de départ, la matrice et la justification de toutes les infractions subséquentes. Nourreddin BONGO VALENTIN en est l’auteur principal et le bénéficiaire direct.

    En conséquence, il convient de déclarer constitué à son égard le crime de détournement de deniers publics.

    Sur la corruption active :

     

    Aux termes de l’article 133 du code pénal, la corruption active se manifeste dès lors qu’une personne, physique ou morale, offre, promet ou donne, directement ou indirectement, à un agent public, à une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou exerçant un mandat électif public, un « avantage » quelconque, dans le but d’influencer son action ou sa décision.

    Cet avantage peut être des espèces (Crim., nov. 1955), un chèque ou effet de commerce (Crim., 22 avr. 1937), un objet précieux (Crim., 22 avr. 1937) ou un hébergement ou logement (Crim., 30 oct. 1995).  

     

    Il est reproché à Nourreddin BONGO VALENTIN d’avoir commis le délit sus visé.  Cependant, dans son mémoire du 3 juin 2023, son conseil soutient que le délit n’est pas caractérisé étant donné que « c’est Monsieur Yann KOUBDJE qui a apporté l’argent pour le remettre au porte parole, Jessye ELLA EKOGHA, pour ensuite le remettre aux membres du CGE qui l’avait exigé pour réparer la faute du porte-parole qui avait irruption dans la salle des plénières ».

     

     Cette version des faits est battue en brèche par les déclarations de Ian Ghislain NGOULOU et Cyriaque MVOURIADJAMI, tant en enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur, selon lesquelles c’est plutôt Nourreddin BONGO VALENTIN qui avait instruit Yann KOUBDJE d’aller chercher la somme de 500.000.000 de FCFA afin de réparer l’incident causé par Jessye ELLA EKOGHA et c’est également Nourreddin BONGO VALENTIN qui leur avait demandé d’aller au siège du Centre gabonais des élections remettre cette somme à François OYABI.

     

     En agissant ainsi au lieu d’opter pour l’application du règlement intérieur du Centre gabonais des élections, Nourreddin BONGO VALENTIN a utilisé Ian Ghislain NGOULOU et Cyriaque MVOURIADJAMI comme des intermédiaires dans l’optique d’influencer l’action ou la décision des membres du CGE. 

    Dès lors, l’offre frauduleuse de la somme de 500.000.000 de FCFA a été effectuée « indirectement » par Nourreddin BONGO VALENTIN. Il s’agit alors d’une « corruption à travers un intermédiaire » ou « corruption par personne interposée ». Il convient de dire constitué ce délit à son encontre.

    Sur la concussion :

     

    Selon l’article 127 du code pénal, la concussion est le fait pour une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, de recevoir, d’exiger ou de percevoir une somme indue à titre de droits ou contributions, impôts ou taxes publics est une concussion ; 

    La concussion traduit un abus de pouvoir nu et cynique, assumé par ceux qui, dépositaires de la puissance publique, en ont fait un privilège de caste.

    Il est fait grief à Nourreddin BONGO VALENTIN d’avoir commis cette infraction. Mais, il réfute les faits mis à sa charge.

    Cependant, l’information a établi qu’il avait perçu divers bonus pétroliers et que le dernier bonus pétrolier était lié « à un nouveau contrat de l’Etat avec la société Pérenco d’un montant environ de 27 millions de dollars payé en juillet 2023 » soit plus de 16 milliards de FCFA (PV d’enquête préliminaire, pièce 2, feuillet n° 01/10).

    En percevant des sommes d’argent liées à des contrats signés entre l’Etat et une société pétrolière à titre de « droits rémunératoires » ou de « bonus », sans aucun texte légal ou réglementaire, Nourreddin BONGO VALENTIN a tiré bénéfice de ses fonctions ou de ses liens familiaux avec le Chef de l’Etat pour recevoir ou exiger des rémunérations ou indemnités auxquelles il savait ne pas lui être dues. 

    Ainsi, ce délit devrait être déclaré caractérisé à son encontre.

    Sur le blanchiment des capitaux :

     

    Attendu qu’aux termes de l’article 380 du code pénal, constitue un blanchiment de capitaux, le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect.

    Le but poursuivi est d’éviter que quiconque ne puisse remonter la piste de l’argent et d’en retrouver la provenance illicite. 

     

    Il se réalise par une opération économique, que l’on divise en trois phases : le placement (prélavage), c’est-à-dire l’introduction des bénéfices illégaux dans le circuit financier ; la conversion ou l’empilement (lessivage), destiné à éloigner les fonds de leur source délictueuse et l’intégration (essorage), consistant à réintroduire les fonds par le biais d’activités économiques licites. En d’autres termes, il s’agit pour son auteur de cacher l’origine des biens ou des numéraires acquis par le biais d’une activité illégale. 

     

    Nourreddin BONGO VALENTIN réfute les faits mis à sa charge en prétextant, dans les écritures datées du 3 juin 2025, qu’il n’a pas pu démontrer l’origine licite de son patrimoine car il était privé de liberté.

     

    Une telle assertion ne saurait résister à l’épreuve du système de blanchiment des capitaux mis en place par Nourreddin BONGO VALENTIN tant au niveau national qu’au niveau international. En effet, l’information judiciaire a mis en relief un système complet de blanchiment fondé sur trois étapes typiques : le placement, l’empilement, et l’intégration.

     

    Le placement constitue la première phase du blanchiment, consistant à introduire dans le circuit financier des sommes issues d’activités illicites sous couvert d’opérations ordinaires.

    Les investigations ont démontré que des fonds publics extraits de la Présidence de la République, notamment des lignes budgétaires dites « fonds de souveraineté » et « provisions spéciales », ont été injectés dans des comptes privés ou affinitaires détenus par ou pour le compte de Nourreddin BONGO VALENTIN et de Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO. 

    Ces comptes identifiés comme premiers réceptacles de ces flux illicites sont notamment :

    • le compte joint Ali/Sylvia Bongo à la BGFI Bank ;
    • les comptes SCI Martin-Pêcheur, SCP Yssia, SCI Lilya, SCI Ambowe Nomba, SCI Paradic, et SANA Investments à BGFI, UGB, ORABANK et BICIG ;
    • et les comptes Logistique 2.3 et SEGS, à BGFI .

    Ces sociétés, pour la plupart dépourvues d’activité commerciale réelle, ont servi à recevoir des virements du Trésor souvent sous forme de « paiements pour services » ou « travaux » jamais exécutés avant d’opérer des transferts internes ou des retraits massifs en espèces.

    Cette mécanique de placement illégal se traduit, dans les relevés bancaires, par des mouvements anormaux, réguliers et synchronisés, entre comptes familiaux et sociétés satellites :

    • 9 682 525 112 F CFA sur la SCI Martin-Pêcheur ;
    • 21 milliards de F CFA sur la SCP Yssia ;
    • 3,8 milliards de F CFA sur la SCI Ambowe Nomba ;
    • 361 millions de F CFA sur la SCI Lilya, reversés à GERI ;
    • et 850 millions de F CFA sur la SANA Investments, tous provenant directement de circuits publics.

    Ces versements s’accompagnaient de notes internes falsifiées, donnant l’apparence de dépenses institutionnelles, alors qu’ils étaient destinés à financer des biens et services de luxe : ameublement, voyages, œuvres d’art, acquisitions immobilières et aéronautiques.

    La seconde phase du blanchiment consiste à multiplier les intermédiaires et les structures de transit pour brouiller la traçabilité de l’argent. L’enquête révèle un empilement organisé de sociétés écrans, au Gabon comme à l’étranger, dont les caractéristiques sont identiques : absence de siège social effectif, comptes dormants ou à usage unique, gérances croisées confiées à des prête-noms.

    Les témoignages de M. Kim OUN et de Mme Léa Murielle NDONG, gérants fictifs de certaines SCI et mandataires du couple BONGO, confirment avoir été sollicités pour « porter les sociétés au nom de Madame afin qu’elle ne soit pas visible ». Mme NDONG a cité, devant votre barre, qu’elle gérait plus de 20 SCI lui appartenant.

    Les sociétés suivantes sont expressément identifiées comme vecteurs d’empilement et de dissimulation à savoir :

    • à l’étranger : Shanah Investments Ltd, M9 Investment Ltd, Loup Ltd, Lekoni Ltd, Mykasa Ltd, Téké Ltd, Lewaï Ltd, Crystal Springs Management Ltd (BVI), Artesia Holdings FZE, Lewaï Investment FZE, Noor Capital et Royal Capital (EAU).
      – au Gabon : SCI Martin-Pêcheur, SCP Yssia, SCI Lilya, SCI Ambowe Nomba, SCI Paradic, SCI Sable, SCI Africa Dream, SCI Stellar, SCI Elysea, SCI Mars, et SANA Investments.

    Ces structures forment un véritable labyrinthe de sociétés gigognes, reliées entre elles par des virements successifs, des participations croisées et des flux circulaires entre comptes bancaires BGFI, UGB et institutions étrangères.

    Ainsi, la SCI Ambowe Nomba détient le compte UGB n° 90000489354-21, lequel a été approvisionné par des virements suspects de 3.800.000.000 FCFA, en 2019 et de 1.490.000.000 FCFA, en 2020 provenant de l’étude d’un notaire ainsi qu’une somme de 1.200.000 FCFA provenant d’une société de BTP.

     

     La SCI Lilya est titulaire d’un compte n° 90000771081-01 dans les livres de la banque UGB. Ce compte est un compte de passage car une fois approvisionné par les virements de la SCI Martin, les fonds sont ensuite virés dans le compte de Canal RTLS à la banque BGFI et dans un compte appartenant à la société GERI. 

     

    En ce qui concerne la société GERI, les fonds ne restent non plus sur ce compte. Ils font l’objet de retraits massifs d’espèces à savoir 460.000.000 FCFA, 250.000.000 FCFA et 280.000.000 FCFA les 23 et 24 mai, 9 et 12 juin et 9 août 2023.

     

    Quant à la SCI Martin Pêcheur, elle détient un compte BGFI n° 41028709011-15 alimenté par des remises de chèque provenant de l’étude MOUYAGA 942.950.159 FCFA en 2022, du couple Ali et Sylvia BONGO ONDIMBA 2.882.525.112 FCFA entre 2016 et 2022, de la Société internationale des Services 1.300.000.000 FCFA en 2018 et 2019, de la société Internationale d’Ingénierie 1.800.000.000 FCFA et de la société Nvulu 2.700.000.000FCFA soit un total de 9.682.525.112 FCFA. 

     

    Cette SCI Martin Pêcheur détient également un compte UGB n° 9000503603851, alimenté par des remises de chèques provenant du compte Martin Pêcheur BGFI d’un montant de 720.000.000 en 2019. Ce même comte est également alimenté par des virements non identifiés de 825.000.000 FCFA, en 2020, de 1. 400.000.000, en 2021, de 930.000.000 FCFA, en 2022 et de 210.000.000 FCFA, en 2023, soit un total de 4.455.000 FCFA. 

     

    Par la suite, ces fonds ont été, en grande partie, transférés à l’étranger en faveur entre autres des Ateliers Valentin Bouvet, en France, pour des travaux de potager et d’animalerie à Libreville d’un montant de 432.931.620 FCFA, de Lemaire Tricotel, en France, pour importation des matériaux de potagerie d’un montant de 123.870.920 FCFA et de la société Saota Pty Ltd, en Afrique du Sud, pour des travaux de pistes sportives d’un montant de 114. 195.017 FCFA.

     

    Vous vous imaginez 432.931.620 + 123. 870.920 = 556.802.540 FCFA simplement pour un simple potager. C’est ahurissant. C’est le montant d’un scanner de seconde main acheté aux USA.

    En examinant les opérations effectuées par la SCI Martin Pêcheur, il en résulte la mise en œuvre effective d’un pacte corruptif reposant sur l’utilisation des comptes de passages et de sociétés écrans, l’implication de notaires et des sociétés d’investissements et les transferts sans lien avec l’objet social.

    Une autre SCI dénommée Akrasia a également reçu plusieurs virements de la société ISIS, en 2012, dont le plus important s’élève à 491.967.750 FCFA. Par la suite, ces fonds ont également été transférés à l’étranger d’un montant de 351.068.186 le 23 juillet 2012 et en huit opérations, les 11 et 12 juin 2012 pour un total de 638.068.186 FCFA.

     

    Toutes ces sociétés civiles immobilières constituent en réalité des sociétés écrans permettant d’éloigner les biens immobiliers acquis illicitement de leurs véritables propriétaires.

     

    A travers quelques-unes de ces sociétés civiles immobilières, Nourredin BONGO ONDIMBA a acquis plusieurs propriétés bâties. Ainsi, la SCI Lilya est titulaire des titres fonciers n° 2 238, n° 18 560, n° 13 318, n° 9 965 et n° 20 276, la SCI Martin Pêcheur est titulaire des titres fonciers n° 5 428, n° 5 431, n° 5 432, n° 5 444, n° 5 445, n° 9075 et les SCI Mars, Stellar et Ambowe Nomba sont titulaires respectivement des titres fonciers n° 3 588, n° 21 917 et n° 7832.

     

    Enfin, il est également actionnaire dans les sociétés Alpha Century Mining, Nouvelle Gabon Mining et actionnaire majoritaire dans les sociétés Akrasia et Sana Investment. 

     

    Avec son frère Jalil BONGO ONDIMBA, ils ont créé les sociétés CAPELA SA et EQUARIUS SA en 2017 et en 2019. Le 20 juin2019, Jalil BONGO ONDIMBA a signé un contrat de prêt avec la société CAPELA d’un montant de 6.596.438.000 FCFA remboursable sur 10 ans. 

    A cette même date, Nourreddin BONGO ONDIMBA a également signé un contrat de prêt avec la société EQUARIUS d’un montant de 6.275.500.000 FCFA remboursable sur dix ans. 

     

     Toutefois, il apparaît plusieurs indices de nature à jeter un doute sur la réalité des prêts consentis (actionnariat unique, aucune trace de la libération effective du capital, chiffres d’affaires nuls, absence d’employés, désignation de proches comme gérant et absence d’activité réelle). Mieux, le capital social et l’objet social de ces deux sociétés sont identiques et les boites postales, numéros d’immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier se suivent. 

     

    Au regard de ce qui précède, il ne souffre d’aucun doute qu’il s’agit de prêts fictifs consentis à des sociétés en vue de finaliser le processus de blanchiment de fonds en espèces d’un montant total de 12.871.938.000 FCFA.

     

    Les deux sociétés Capella SA et Equarius SA, détenues directement ou indirectement par Nourreddin BONGO VALENTIN, constituent le cœur de cette architecture :

    • Capella SA déclare un « prêt intragroupe » de 6 596 438 000 F CFA, sans mouvement bancaire correspondant ;
    • Equarius SA prétend un financement de 6 275 500 000 F CFA, sans activité ni bilans certifiés.

    Toutes ces deux sociétés détiennent ensemble 10 % du capital de BGFI Holding Corporation, valorisés à 417 milliards de F CFA. A cela s’ajoute 0,7 % du capital détenu par la société SELCO appartenant à Sylvie BONGO ONDIMBA. Toutes ces parts ont été acquises par le recyclage des fonds publics détournés.

    Extraits de comptes de CAPELLA et de EQUARIUS (pièces 2 et 3).

    Cette complexité n’a pas d’utilité économique ; elle n’a qu’une finalité pénale : effacer la trace de l’origine publique des fonds.

    La troisième phase, dite d’intégration, vise à réintroduire les fonds blanchis dans le circuit économique légal par des acquisitions d’actifs, des placements ou des investissements à forte valeur patrimoniale.

    Cette conversion se fait par l’intermédiaire de Royal Capital, Noor Capital et Lewaï Investment FZE, toutes sous contrôle de Nourreddin BONGO VALENTIN et des investissements offshore notamment Alpha Centauri Mining SA (détention de mines d’or gabonaises), société New Opportunity aux Iles Vierges Britanniques et Beetl UK Ltd (participations croisées au Royaume-Uni).: Robusto Investment Fund SPC (Îles Caïmans), évalué à 1.035.000.000 FCFA F CFA. Après vérification auprès de la banque, il s’agit en réalité de cette somme et non de 1035 milliards. 

    D’autres  sociétés appartenant à Nourreddin BONGO VALENTIN participent également à cette conversion notamment NM9 Investment, Loup Limited, Leconi Limited, Teke Limited, Lewai Limited et Mykasa Limited, au Royaume Uni, d’un compte n° 5708388012189600001 à la Bank Eric Sturdza SA, en Suisse, crédité d’un montant de 780.428.698 FCFA, d’un compte n°20081563208 à la banque Rothschild Martin Maurel, à Monaco, crédité de 61.634.768 FCFA et d’un compte n° AE50261515398856000002 aux Emirats Arabes Unis crédité d’un virement de 1.301.218 dollars.

    En insérant dans le circuit économique les capitaux illégalement acquis en vue de les faire passer comme légitimes, Nourreddin BONGO ONDIMBA a commis le délit de blanchiment de capitaux.

     

    Dans ce cas, il s’agit de « l’autoblanchiment » étant donné qu’il est à la fois auteur de l’infraction de l’origine et auteur du blanchiment (Cass. crim 16 sept 2015, n°15-83204, inédit : Dr. pén. nov. 2015, comm. 136, obs. Conte).

    La structure pyramidale du système — placement local, empilement offshore, intégration patrimoniale — démontre la préméditation et la sophistication du dispositif, caractéristiques de la criminalité financière organisée.

     La participation des intermédiaires financiers et juridiques (Me Alain MALEK, Marion SCAPATICCI et Jordan CAMUSET) démontre l’existence d’une bande organisée, ce qui confère à l’infraction un caractère aggravé au sens de l’article 382-2 du Code pénal.

    Déclaration sur l’honneur de Nourredin

    Libreville, le 18 septembre 2023

    « Je soussigné, Nourreddin BONGO VALENTIN, déclare ce qui suis. Tous les fonds que j’ai reçu pendant que j’étais CGAP et après venait de mon père. Je n’ai jamais reçu ou pris 1 FCFA de NGOULOU ou Mohammed ou reçu une rétro-commission de quelqu’un.  Je ne souhaite que voir mes enfants grandir, ils représentent tout pour mois. Je suis disposé à payer la somme décidée ou encore abandonner mes bien et richesse personnelle dans le but d’être avec mes enfants. Ma femme, avec trois enfants de bas âge, ne travaille pas donc elle ne pourra pas d’en sortir » (pièce 5). 

    Sur l’usurpation de fonction :

     

    Il résulte des dispositions de l’article 165 du code pénal que sont punis de peines correctionnelles, ceux qui sans titre, se seront immiscés dans l’exercice des fonctions publiques, en accomplissant l’un des actes réservés aux titulaires de ces fonctions.

     

    Les fonctions publiques visées par l’article sus visé sont celles qui s’exercent par une délégation de l’autorité publique (Crim. 11 D2C.,1962 : Bull. Crim. n° 368 ; D. 1963). 

     

    Nourreddin BONGO VALENTIN nie les faits en prétextant avoir posé des actes non pas en qualité de Coordonnateur général des affaires présidentielles mais sur instructions du Président de République et ce, pour des missions spécifiques qu’il lui confiait personnellement. 

     

    Or, selon les témoignages concordants et les documents saisis, M. Nourreddin BONGO VALENTIN, après avoir été démis de ses fonctions officielles de Coordonnateur général des affaires présidentielles en 2021, a continué à exercer, de fait, une autorité administrative et financière au sein de la Présidence de la République, sans titre légal, ni délégation de pouvoir, ni base institutionnelle.

     

    Ainsi, selon Mohamed Aliou SALIOU, après sa cessation officielle, en septembre 2021, « il a continué non seulement à donner des ordres à tous les collaborateurs directs du Chef de l’Etat mais aussi il organisait les réunions par vidéo zoom et en présentiel, dans les bureaux qu’il occupait en tant que Coordonnateur général des affaires présidentielles et lors de ses passages au Gabon, il recevait même des Ministres, Directeurs Généraux de l’administration publique et pour preuve, sa secrétaire Wilma n’a jamais arrêté d’exercer sa fonction » (PV d’enquête préliminaire, feuillet n° 02/03).

     

    Abdul OCENI OSSA et Jessye ELLA EKOGHA abondent dans le même sens à savoir que « c’est lui qui validait avant même présentation au Chef de l’Etat les nominations dans le Gouvernement et dans l’administration » (PV d’enquête préliminaire, feuillet n° 02/03) et que « sa démission ne l’a pas empêché de garder les mêmes prérogatives et de continuer à donner les ordres par le biais de Ian Ghislain NGOULOU et de Mohamed Ali SALIOU » (PV d’enquête préliminaire, pièce n°02, feuillet n° 01/10) ; 

     

    Dans le même sens, Nourreddin BONGO VALENTIN a reconnu explicitement qu’il conseillait « officieusement » son père. 

    Que ce rôle de conseiller consistait, selon lui, à faire le « suivi des sujets spécifiques pour (son) père dans tous les domaines politique, économique et social à l’exemple de l’opération Blue-Bond relative au rééchelonnement de la dette extérieure de l’Etat » (PV d’enquête préliminaire, feuillet n°02/06).

     

    En outre, plusieurs correspondances et notes manuscrites, versées au dossier, portent la mention « Accord pour exécution immédiate / N. B.V. », adressées au Directeur Général du Budget et au Directeur Général du Trésor et de la Comptabilité publique, ont donné lieu à des paiements effectifs d’un montant cumulé de plusieurs milliards de francs CFA au profit de sociétés telles que Logistique 2.3 et Société Équatoriale de Gestion des Services (SEGS). Ces instructions, dépourvues de valeur légale, étaient exécutés en raison de l’autorité de fait qu’exerçait encore l’intéressé.

     Par ailleurs, lors de la perquisition effectuée le 15 septembre 2023, à son domicile, un ordre du conseil des ministres daté du 19 février 2021, un projet du gouvernement Rose OSSOUKA RAPONDA, deux cachets pour des visas d’opportunité PR CGAP et deux cachets pour des visas de conformité CGAP y avaient été retrouvés.

    Ainsi, il continuait à intervenir dans les affaires publiques en posant des actes déterminés et caractéristiques des fonctions usurpées de de Coordonnateur général des affaires présidentielles. Ce délit devrait également être constitué à son encontre.

    Sur l’association de malfaiteurs :

    Selon les articles 193 et 194 du Code pénal gabonais, il y a association de malfaiteurs lorsqu’est constatée l’existence d’un groupement formé ou d’une entente établie en vue de la préparation, de la commission ou de la facilitation d’un ou plusieurs crimes ou délits, et que cette entente se manifeste par une répartition de rôles, une mise à disposition de moyens ou une permanence de l’organisation.

    En l’espèce, il est reproché à Nourreddin BONGO VALENTIN d’avoir commis ce délit. Mais, il le réfute.

     Cependant, l’information judiciaire a mis en exergue un système organisé, animé par un centre de décision restreint et exécuté par des relais identifiés en vue de capter l’argent public, le faire sortir des circuits de l’État, le recycler au profit d’intérêts privés.

    L’impulsion du système est venue d’un binôme familial et politique composé de Noureddin BONGO VALENTIN, Mme Sylvia Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO. Ces deux personnes ne se sont pas contentées de bénéficier des flux : elles ont structuré le mode opératoire (création de SCI, ouverture de comptes, substitutions de gérance, envoi de fonds à Dubaï et Londres, recours à des intermédiaires financiers étrangers). Elles ont donc exercé un rôle de chefs de file de l’entente.

    Pour que le mécanisme fonctionne, ce noyau a eu recours à un cercle de proximité chargé d’exécuter matériellement les opérations, de porter les sociétés ou de servir d’interface avec les banques.

    Entrent dans ce cercle, selon les pièces du dossier et les débats à l’audience :

    • M. Kim OUN : décrit dans les PV comme “assistant” ou “homme de confiance” de Mme Sylvia Bongo. Il gère ou a géré plusieurs structures (SCP Yssia, SCI West 1 Jay, SCI Stellar) sans activité propre. Il reconnaît le rôle de Dubaï (Royal Capital, Noor Capital) comme point de réapparition de fonds sortis en espèces à Libreville. Il est le vecteur typique de l’interposition.
    • Mme Léa Murielle NDONG : gérante ou mandataire de plusieurs SCI (elle a cité une vingtaine). Elle a accepté de servir de prête-nom, de figurer à la place des bénéficiaires réels et recevait en contrepartie 5.000.000 tous les mois du Trésor Public. 
    • M. Jordan CAMUSET et Mme Michèle AHOLOU.

    On retrouve, chez tous ces intervenants, les trois mêmes stigmates de l’association de malfaiteurs :

    1. Réception de fonds sans cause économique réelle ;
    2. Transfert vers une structure du même réseau (SCI familiales, sociétés d’hôtellerie du groupe Wali, SANA Investment, Mayena Foods) ;
    3. Absence d’explication licite commune, mais même origine : la Présidence, le Trésor, ou une société publique facturée fictivement.

    Ces faits ne s’étalent pas sur quelques mois mais sur une séquence d’au moins dix années (2013–2023), avec apparition régulière de nouvelles SCI (Nourra, Stellar, Africa Dream, SCI de 2023), ce qui montre que l’organisation s’adaptait au temps et aux besoins (succession patrimoniale frauduleuse, rajeunissement des gérances, ouverture de nouveaux comptes).

    On constate une même main derrière des opérations séparées dans le temps :

    • 2016–2020 : grosses alimentations de SCI Ambowe Nomba via étude notariale, immédiatement placées en DAT ou valeurs mobilières ;
    • 2020–2023 : alimentations de SANA Investment et réexpéditions à l’étranger ;
    • 2023 : création de SCI récentes (Nourra, Stellar) alors même que les premières structures sont déjà fortement dotées ;

    Cette constance exclut la thèse de l’initiative isolée de tel ou tel mandataire : on ne crée pas quinze à vingt-quatre entités immobilières dormantes, toutes au bénéfice du même cercle familial, sur dix ans, sans qu’il y ait programme commun ;

    Le but de l’entente était double :

    1. Un but principal financier : capter des flux publics, les faire transiter par des entités privées et les transformer en patrimoine (hôtels, résidences, parts de banques, jets, palais à l’étranger) ;
    2. Un but connexe d’occultation : effacer le lien entre la puissance publique et les bénéficiaires finaux en multipliant les écrans.

    Ce but était nécessairement connu des principaux intervenants, pour trois raisons :

    • les montants : on ne reçoit pas 3,8 milliards de F CFA sur un compte dormant de SCI (Ambowe Nomba) sans s’interroger sur l’origine ;
    • la répétition : quand la SCP Yssia, présentée comme structure de gestion, reçoit plus de 21 milliards et les renvoie vers l’étranger, la fictivité devient évidente ;
    • les instructions : Kim OUN explique que l’objectif était « de ne pas mettre Madame en avant ». Cela matérialise la conscience de la dissimulation.

    Au regard de ce qui précède, il convient de dire que cette infraction est constituée à son encontre.

    SUR LES FAITS REPROCHES A SYLVIE AIMEE MARIE VALENTIN EPOUSE BONGO :

     

    Sur le blanchiment des capitaux :

     

    Aux termes de l’article 378 du code pénal, constitue un blanchiment de capitaux, tout acte de nature à faciliter la justification mensongère de l’origine des biens de son auteur. En d’autres termes, c’est le fait de faciliter par tout moyen la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect. 

     

    Il résulte des pièces du dossier que Sylvie Aimée Marie VALENTIN ép. BONGO a mis en place un système de blanchiment des capitaux comprenant 10 personnes physiques, 27 personnes morales dont 18 SCI, 1 société civile professionnelle, 1 société civile de participations, 3 sociétés immobilières, 1 cabinet de notaire, 1 société de travaux, 1 école et 1 société de portefeuille.

     

    Ces sociétés civiles immobilières et sociétés immobilières constituent la plaque tournante du système de blanchiment de capitaux Elles sont gérées par elle-même ou ses fils ou par des collaborateurs tels que Léa Murielle NDONG, Mme Pascale EBOUNDA ainsi que Kim OUN et Claude Michel SEZALORY. 

     

    Ces sociétés civiles immobilières sont liées par des conventions à deux sociétés immobilières, IMEST et ALLIANCE, gérées respectivement par Anne Marie Paule VALENTIN épouse HAFFRAY, sa sœur, et par Claude Michel SEZALORY.

     

    Plusieurs de ces sociétés présentent les mêmes caractéristiques de fictivité : absence d’activité économique licite, gérances interposées, comptes très alimentés puis rapidement vidés, transferts croisés etc.

    SCI Martin-Pêcheur

    Société identifiée comme véhicule central d’acquisition et de transit de fonds publics détournés.
    Détient les comptes BGFI n° 41028709011 15 et UGB n° 90000503603 51, alimentés entre 2016 et 2023 à hauteur de 9 682 525 112 F CFA.
    Les fonds proviennent directement du couple Ali et Sylvia Bongo Ondimba, de sociétés satellites (Société Internationale des Services, Société Internationale d’Ingénierie, NVULU) et de notaires. Ils sont ventilés vers des entreprises de travaux ou de service : Ateliers Valentin Bouvet, Lemaire Tricofel, DS Logistics, St Groupe, ainsi que vers d’autres SCI du réseau (Paradic, Lilya, GERI).
    Cette SCI constitue un compte de passage caractéristique, dépourvu d’activité économique licite.

     

    SCI West 1 Jay

    Créée en 2017, détenue à 99 % par M. Kim Oun – homme de paille de Mme Sylvia Bongo Ondimba -, la gérance étant assurée par Mme Pascale Ebouda, mandataire unique.
    Le compte UGB n° 90000396211 90 a reçu plus de 6 milliards de F CFA provenant d’un compte joint du couple Bongo Ondimba.
    Des transferts à l’étranger, notamment vers la société HMRC Shipley (Royaume-Uni), ont servi au paiement des taxes d’une propriété londonienne (40 Charles Street), via la société Crystal Springs Management Ltd, elle-même détenue par Mme Sylvie Aimée Valentin.
    Cette structure illustre une manœuvre de dissimulation par prête-nom et par interposition de sociétés offshore.

     

    SCI Ambowe Nomba

    Créée en 2001, détenue par Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, et ses fils Noureddin et Jalil. Compte UGB n° 90000489354 21 approvisionné en 2019 par l’étude Me Ogoula pour 3,8 milliards de F CFA, issus de fonds de la société Nine Engineering. Une prétendue « cession immobilière » non enregistrée et un titre foncier jamais transféré (n° 7832), les fonds ayant ensuite été placés en DAT et valeurs mobilières.

     

    SCP Yssia

    Créée en 2011, gérée successivement par Mme Léa Murielle Ndong et M. Kim Oun pour le compte de Mme Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO.
    Comptes UGB et BGFI alimentés par le couple Bongo Ondimba pour plus de 21 milliards de F CFA entre 2016 et 2023, avec transferts réguliers vers la France, le Royaume-Uni et Hong Kong.
    Aucune activité réelle de gérance immobilière : la SCP sert de compte de redistribution et de blanchiment de revenus publics.

     

    SCI Lilya

    Créée en 2012, modifiée en 2022, détenue par Noureddin et Jalil Bongo Valentin. Gérance déléguée à Mme Léa Murielle Ndong.
    A reçu 361 millions de F CFA de la SCI Martin-Pêcheur en 2023, transférés aussitôt à la société GERI pour « travaux ».
    Compte de passage sans activité commerciale réelle, typique du recyclage de fonds détournés.

     

    SCI Athena I et SCI Pegasus

    Créées en 2014 et 2012 respectivement, détenues à 100 % par le couple Ali et Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO,, sans biens immatriculés ni comptes bancaires. Ces structures figurent parmi les sociétés dormantes utilisées pour masquer des actifs.

     

    SCI Nourra

    Créée en 2023, détenue par les fils Bongo Ondimba.
    Aucune activité ni titre foncier identifié. Structure récente, probablement préparée pour succession patrimoniale frauduleuse.

     

    SCI Stellar

    Créée en 2023, détenue et gérée par M. Kim Oun, titulaire du titre foncier n° 21 917. Présente les mêmes signes de fictivité et de proximité avec le cercle Bongo.

     

    SCI Africa Dream

    Détenue par Jalil et Noureddin Bongo Ondimba, gérée par Mme Léa Murielle Ndong. Possède plusieurs titres fonciers (1 405, 2 898, 23 595, 18 983, 18 984) sans compte bancaire identifié.
    Structure de portage immobilier sans activité déclarée.

     

    SCI Elysea, Tellus II, Valbona, Green Equator
    Créées entre 2013 et 2014, détenues par Mme Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, et ses fils. Les fonds et revenus des biens sont encaissés directement par Mme Sylvia Bongo Ondimba ou ses sociétés de gestion (Alliance, Imest), puis transférés vers l’étranger. Elles sont classées comme sociétés écrans sans activité licite avérée.

     

    SCI Mars

    Créée en 2009, reprise par les fils Bongo en 2013 puis par Mme Sylvia Bongo en 2022.
    Titulaire du titre foncier n° 3 588 (16 138 m²), compte UGB n° 90000391725 65, alimenté à près de 395 millions F CFA dont 136 millions reversés à Mme Sylvia Bongo.
    Utilisée pour le reversement de loyers et transferts vers des comptes étrangers.

     

    SCI Sable

    Détenue par Mme Sylvia et ses fils, gérée par Mme Léa Murielle Ndong. Titres fonciers n° 1 512 et 3 769, loyers perçus par la société Alliance et transférés vers les comptes de Mme Sylvia, Jalil et Noureddin au Maroc et en Suisse.
    Illustration parfaite de la rétro-alimentation par les loyers.

     

    SCI Paradic

    Créée en 2008, rachetée par le couple Bongo la même année.
    Titres fonciers n° 10 663, 10 699, 10 700 et 16 663. A versé 460 millions F CFA à la société GERI en mai 2023 (espèces retirées).
    Sert de compte tampon entre revenus immobiliers et fonds en espèces.

     

    Société SANA Investments

    Société familiale de portefeuille créée en 2020, gérée par Christophe Ondimba Valentin, appartenant à Mme Sylvia et ses fils.
    Alimentée par le compte joint du couple Bongo (850 millions F CFA) et reversant des fonds à l’école Ruban Vert (577 millions).
    Véhicule de brouillage des flux et d’interposition fictive.

     

    École Ruban Vert

    Société mixte détenue en partie par SANA Investments et Noureddin Bongo. Reçoit des fonds de SANA Investments et les réexpédie à l’étranger (Consulting House Factory, plus de 2 milliards F CFA). Instrument de transfert international déguisé en dépense éducative.

     

    Fondation Sylvia Bongo Ondimba pour la Famille

    Structure associative alimentée par des dons d’entreprises publiques ou liées (Perenco, GSEZ, Nouvelle Gabon Mining), 1,9 milliard F CFA en 2020. Mandataire : M. Kim Oun. Utilisée pour mélanger flux caritatifs et flux personnels, avec virements étrangers et espèces.

     

    Sociétés Equarius SA, Capella SA et Alpha Centauri Mining SA Structures sociétaires de détention de titres, appartenant à Noureddin ou Jalil Bongo pour partie ou intégralement.
    Liées à des prêts fictifs et des rachats de sociétés offshore (Lewaï Investment et Artesia Holdings FZE).
    Elles sont au cœur de l’empilement financier servant à blanchir les fonds issus du trésor public.

     

    Ces structures n’ont pas été créées pour investir, mais pour accaparer. Elles ne sont pas des entreprises : ce sont les coffres-forts d’un pouvoir familial.

    Pour la période 2016-2023, ces sociétés civiles immobilières ont été financées à hauteur de 42 milliards de FCFA.

     

    Par la suite, une partie de ces fonds a été virée, souvent par des voies détournées, sur ses comptes personnels et ceux de ses fils Nourreddin et Jalil à Monaco, aux Emirats Arabes Unis, U Maroc et au Royaume Uni. 

     

    Plusieurs virements sont suspects dont deux reçus le 18 octobre 2019 de la société Nine Engeneering et justifiés par une attestation de cession immobilière établie par Me OGOULA, notaire à Libreville, le 18 octobre 2019. A l’analyse des pièces, il apparaît que la société Nine Engeneering est une société écran dans la mesure où la vente n’est pas conclue en son nom bien qu’elle assure le règlement et l’attestation délivrée par le notaire relatif au titre foncier n° 7832 est fausse.

     

    Une autre partie de ces fonds a servi à masquer l’origine illicite des fonds issus des détournements des fonds publics. A titre d’exemple, en 2020, une somme de 236.250 GBP, soit environ 180.000.000 FCFA avait été transférée en faveur de la société HMRC Shipey pour paiement de taxes et impôts annuels pour le compte de la société Crystal Springs Management LTD appartenant à Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO et immatriculée aux Iles Vierges Britanniques. 

     

    En somme, l’analyse révèle que Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO a créé, à travers des sociétés civiles immobilières, des montages financiers impliquant plusieurs comptes souvent alimentés par des fonds du Trésor Public et reliant diverses personnes et sociétés écran dans un réseau interconnecté. 

    En agissant ainsi, elle a utilisé des intermédiaires et hommes de paille afin de masquer les traces et la source des fonds illicites.

     

    Plus grave, selon l’information judiciaire, elle a fait main basse sur les SCI Terceira et SCI Blu Rivage, appartenant à des tiers selon les fiches circuit ANPI n°005-7091-G11 et ANPI n°004-7273-G11) en s’autodésignant comme actionnaire des dites sociétés et en mettant comme gérante Mme Murielle NDONG.

    L’analyse croisée des flux et des structures révèle une complémentarité fonctionnelle entre la mère et le fils.  M. Noureddin BONGO VALENTIN intervenant en amont comme capteur et ordonnateur de fait, Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, intervenant en aval comme organisatrice de la dissimulation et de l’intégration patrimoniale.

    Une telle répartition des rôles en vue de blanchir les capitaux est caractéristique de l’infraction d’association de malfaiteurs telle que définie aux articles 193 et 194 du Code pénal, qui ne requiert pas seulement la participation matérielle mais la concertation en vue de la commission d’infractions déterminées.

    Une fois les fonds extraits, transités et blanchis, ils ont servi à constituer un patrimoine sans commune mesure avec les revenus légaux des intéressés, patrimoine dont les pièces de la procédure permettent de retracer les composantes les plus significatives. Ainsi, le délit sus visé est constitué à son encontre ;

     

    Sur le recel de détournement de deniers publics :

     

    Aux termes de l’article 312 du code pénal, le recel est le fait, en toute connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen du produit d’un crime ou d’un délit. La connaissance de l’origine frauduleuse des objets ou sommes recelés suffit à caractériser l’infraction.

    Il est reproché à Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO d’avoir commis cette infraction. 

    Cependant, elle nie. 

     

    Or, lors de son audition (PV d’enquête préliminaire, pièce n°3, feuillet n° 01/02), TANASA PATRICHI Christian a affirmé avoir décaissé plus de 400.000.000 FCFA pour la société Africa Practice, appartenant à un ami anglais de Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO et d’avoir fait bénéficier à la fondation Sylvia BONGO ONDIMBA la somme de 100.000.000 FCFA.

     

    Par ailleurs, elle a déclaré avoir reçu 3.982.000.000 de son époux pour ses besoins personnels ainsi que d’importantes sommes du Trésor Public sans en connaitre la raison à savoir 1.442.000.000 FCFA virée dans son compte BICIG, de 6.582.500.000 FCFA et de 4.294.000.000 FCFA virées dans d’autres de ses comptes.

     

    Au total, elle a reçu de son époux, près de 4 milliards pour ses besoins personnels et du Trésor Public 12.264.500.000 sans en connaître la raison. Soit plus de 16 milliards pour ses besoins personnels.

     

    Il suit de tout cela qu’elle a bénéficié en toute connaissance de cause de l’argent issu des détournements massifs des deniers publics dont le montant global s’élève à plusieurs milliards de FCFA.

    Cette imbrication démontre non pas une série d’actes isolés, mais une continuité criminelle mûrie et réfléchie, conduite par les mêmes protagonistes avec une volonté constante de dissimuler la prédation sous les apparences de la légalité.

    En conséquence, l’infraction de recel de détournement de deniers publics sus visée est caractérisée à son encontre. 

    Mesdames et Messieurs,

    Messieurs, 

    Les infractions retenues contre Nourreddin BONGO VALENTIN et Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO, ne forment pas une simple addition de fautes : elles s’enchaînent dans une progression méthodique, chacune étant la condition de possibilité de la suivante.

    Ainsi, le détournement a fourni la matière première du crime ; la concussion a légitimé la perception des fonds ; l’usurpation de fonction a maintenu l’autorité permettant d’ordonner les décaissements ; le blanchiment en a maquillé l’origine ; l’association de malfaiteurs en a garanti la permanence et la reproduction ; enfin, la dissimulation patrimoniale (par SCI et holdings) en a constitué le couronnement juridique : la façade de la respectabilité.

    Une fois blanchis, les fonds étaient réinvestis dans des actifs de prestige, des comptes à Monaco, en Suisse, aux Émirats, au Royaume-Uni, ou dans des projets immobiliers au Gabon. 

    1. b) À l’étranger :

    L’information judiciaire a établi l’existence de deux aéronefs, financés par des flux financiers non justifiés, à savoir Boeing 777 VIP, appareil de ligne converti en usage privé, et un Boeing Business Jet (BBJ), milliards de francs CFA. 

    Selon la Lettre du Continent du 27 mai 2021, le Boeing 777, acheté en 2014, par une société panaméenne Verhill Corporate contrôlée par une holding, dénommée YC Invest, créée par SALAMA David, à Sharjah, dans les Émirats Arabes Unis.

    La valeur estimée cumulée de ces deux aéronefs, d’environ 195 milliards de francs CFA est l’équivalent de cent écoles primaires, vingt hôpitaux départementaux, ou dix ans de budget national de lutte contre la pauvreté.

    Ainsi, des milliards prélevés sur la misère nationale furent transformés en lits dorés à dix mille mètres d’altitude.

    La justice, face à cet apparat, ne s’émeut pas du faste : elle y lit la trace matérielle du crime. 

    Pour eux, les fonds publics étaient comme de l’eau benite, on peut s’en servir, s’asperger sans aucune limite.

    Les actifs hôteliers — temples d’une richesse bâtie sur la pauvreté nationale

    Les excès des accusés ne se sont pas arrêtés aux nuages.
    Ils ont voulu, sur la terre du Gabon, ériger leur fortune au-dessus du peuple, érigeant en pierre et béton les ruines du Trésor public.

    Les investigations ont établi l’origine illicite du financement des complexes suivants :

    • Hôtel Onomo – 79 milliards F CFA ;
    • Radisson Blu – 100 milliards F CFA ;
    • Complexe Mayena – 20 milliards F CFA ;
    • Hôtel Gamba – 15 milliards F CFA.

    Ces quatre établissements totalisent plus de 200 milliards d’actifs immobiliers, financés sur fonds publics par des flux sans origine licite identifiable. Ils ne constituent pas des investissements, mais des temples de la richesse privée bâtie sur la pauvreté nationale. 

    Les ressources naturelles — spoliation de la souveraineté économique

    La prédation n’a pas seulement souillé la surface du pays : elle a creusé jusqu’à ses entrailles.  

     

    D’autres montages financiers ont permis à Nourreddin BONGO VALENTIN, comme il l’a reconnu lui-même, d’acquérir deux champs pétroliers dénommés Sardine et Olowi Perenco, obtenus en 2017 et en 2023 (PV interrogatoire au fond II). 

    Le champ pétrolier “Sardine”, en offshore, recèle près de 40 millions de barils, pour une valeur nette estimée à 350 milliards F CFA (après décotes techniques et fiscales).

    La société NOGA Mining, façade présentée comme entreprise minière, contrôle 150 millions de tonnes de réserves de manganèse exploitables.

    Ces faits ne relèvent pas d’une fraude financière ordinaire, mais d’une atteinte directe à la souveraineté nationale, en ce qu’ils visent à s’approprier les ressources naturelles du pays.

    Les holdings familiales — le bras économique du clan

    La corruption d’un régime se mesure aux bilans qu’il laisse derrière lui. Le holding Delta Synergie, structure faîtière de la galaxie Bongo-Valentin, regroupe plus de trente-cinq sociétés stratégiques couvrant la quasi-totalité des secteurs vitaux de l’économie nationale.

    Les accusés y détiennent directement ou par interposition :
    – 30 % de Delta Synergie,
    – 30 % de Ceca-Gadis, principal groupe de grande distribution,
    – 10 % de BGFI Holding Corporation, soit 417 milliards F CFA sur une valorisation consolidée de 4 173 milliards F CFA. A cela, il faut ajouter 0.7 % de la société SELCO. En tenant compte de leurs actions dans Delta Synergie, les BONGO VALENTIN détiennent 12 à 13 % des actions de BGFI.

    Les biens immobiliers à l’étranger et au Gabon

    À l’étranger, les circuits financiers identifiés ont permis l’acquisition de plusieurs biens d’exception :

    • un palace à Mayfair, Londres, estimé à plus de 60 milliards F CFA, détenu via Crystal Springs Management Ltd (BVI), pour une valeur supérieure à 60 milliards F CFA  ainsi que deux appartements attenants ;
    • un palais à Marrakech, d’une valeur d’environ 70 milliards F CFA, édifié sur plusieurs hectares par un cabinet d’architecture international — un décor de marbre, de boiseries et de fontaines financé par le Trésor du Gabon.

    Enfin, sur le territoire national, la résidence NAM, à Libreville, symbolise la démesure absolue : un domaine de plusieurs hectares, doté de piscines, cinéma privé, auditorium, salle de musique, jardins tropicaux et potager personnel, pour un coût évalué, à dure d’experts, à 80 milliards F CFA.

    Oui, la résidence Nam a couté 80 milliards.

    Cette résidence n’est pas une demeure, c’est un monument d’arrogance, une cathédrale de vanité construite avec l’argent du peuple. 

    Ces acquisitions traduisent le passage du blanchiment à son stade ultime : la conversion de la prédation en prestige, l’apparence du patrimoine légal masquant la substance du crime. 

    Les montants en cause atteignent, pour les seuls flux bancaires domestiques, 2 901 101 005 264 F CFA (Pièce 7).

    A ce montant,  s’ajoute 1  milliard 35 millions de F CFA identifiés sur le fonds Robusto SPC, ainsi qu’un patrimoine de prestige — aéronefs, hôtels, résidences, participations minières et bancaires — évalué à plusieurs centaines de milliards de F CFA ;

    Ainsi se dessine la cartographie du crime économique :

    Des flux publics détournés, transformés en capital privé et consolidés dans un patrimoine mondialisé.

    Ce patrimoine est la matérialisation du délit, la preuve vivante du préjudice, et le miroir de la personnalité de ceux qui, au sommet de l’État, ont choisi l’enrichissement sur la République.

    Ces acquisitions ont été financées avec des fleuves d’argent public, provenant essentiellement des comptes suivants :

    A la banque UGB – Union Gabonaise de Banque


    Sociétés :
    – SCI MARTIN PÊCHEUR – Compte N° 90000503603 51
    – SCI LILYA – Compte N° 90000771081 01
    – SCI WEST 1 JAY – Compte N° 90000396211 90
    – SCI AMBOWE NOMBA – Compte N° 90000489354 21
    – SCP YSSIA – Compte N° 90000282783 01
    – SCI MARS – Compte N° 90000391725 65
    – École RUBAN VERT – Compte N° 90000479363 21
    – Société SANA INVESTMENTS – Compte N° 90000563596 07
    – Abdel BONGO – Compte N° 90000762856
    – Jalil/Louis BONGO ONDIMBA – Compte N° 40002000049000076285638

    Comptes personnels Sylvia BONGO :
    – Compte N° 90000356526 74
    – Compte N° 10681523020
    – Compte N° 40002 00005 10681523020 29

    A la BGFI Bank


    Comptes personnels et entités associées :
    – Compte joint Ali et Sylvia BONGO ONDIMBA – N° 00012998201 95
    – Fondation Sylvia BONGO – N° 41011784011 13
    – Abdel BONGO – N° NGA2140003041001101179201125

    Sociétés :
    – SCI MARTIN PÊCHEUR – N° 41028709011 15
    – Société GERI – N° 41000000726750112 (transit – retraits espèces)
    – SCP YSSIA – N° 41014205011 82
    – SCI IMP Conseil – N° 000072122043
    — École RUBAN VERT – N° 41017912011 35
    – Société AFRICA TEC – N° 41052156011 73
    – Société SANA INVESTMENTS – N° 41049332011 40
    – Société METALES – N° 41050921011 44
    – Société EQUARIUS – N° 41045906011 17
    – Société CAPELLA – N° (à préciser)

    Groupes / entités sans compte actif :
    – HARIS INVEST SAS – plus de compte BGFI
    – GROUPE EVOLITIS – plus de compte BGFI

    A la BICIG – Banque Internationale pour le Commerce et l’Industrie du Gabon

    SCI IMEST – N° 40001 09073 00272700017 84

    ATTIJARIWAFA BANK – France et Maroc


    En France (Attijariwafa Bank Paris) :
    – Sylvia BONGO – Compte N° FR76 2389 0000 0211 0004 4971 570

    Au Maroc (Attijariwafa Bank Casablanca) :
    – Sylvia BONGO – Compte N° N007780000333800040010035
    – Jalil/Louis BONGO ONDIMBA – Compte N° N007780000333500040007916

    A Monaco MARTIN MAUREL – Monaco


    – Sylvia BONGO – N° MC58133 69000094038604201052
    – Nourredin BONGO – N° 20081563208 et N° 20081563103

    En suisse BARING STURZA – Suisse, Genève


    Comptes Sylvia BONGO :
    – N° CH3508388012189500002
    – Compte N° 114759232

    Comptes Jalil/Louis BONGO ONDIMBA :
    – N° CH5208388012189700001
    – N° CH2508388012189700002 (euro)
    – N° CH9508388012189700003 (USD)

    Comptes Nourredin BONGO :
    – N° CH5708388012189600001
    – N° CH3008388012189600002

    Aux Emirats Arabes Unis HABIB BANK – Émirats Arabes Unis


    Comptes Sylvia BONGO :
    – N° AE970280020127771305003 (USD)
    – N° AE030280020127771138303 (£)

    Compte Nourredin BONGO :
    – N° NAE450261515398856000002 (USD) – fermé

    Sociétés internationales :
    – Royaume-Uni : SHANAH INVESTMENTS Ltd, CRYSTAL SPRINGS MANAGEMENT Ltd (BVI, immobilier à Londres), LOUP Ltd, LEKONI Ltd, M9 INVESTMENT Ltd, TÉKÉ Ltd, LEWAÏ Ltd, LUNAR PUB COMPANY Ltd.
    – Émirats Arabes Unis : LEWAÏ INVESTMENTS FZE (fermé, alimenté par 4 sociétés nigérianes), ARTESIA HOLDINGS FZE – N° AE040260001025417287603.
    – Îles Caïmans : ROBUSTO INVESTMENT FUND SPC (portefeuilles Ashton SP – 747 346,01 $ ; Belmonte SP – 8 397 459,23 $ au 30 juin 2023).
    – Îles Vierges Britanniques : NEW OPPORTUNITY STRATEGY FUND Ltd (possiblement MANARA).
    – Gabon : FORAFRIC ÉNERGIE GABON – Compte N° 123759180 (à confirmer) ; DELCO ENERGY (secteur pétrolier).
    – Nigéria :
      – SPRINGCREEK CAPITAL Ltd – 18 comptes (USD, GBP, EUR, NGN)
      – BLUE POINT GLOBAL SERVICES Ltd – 18 comptes (USD, GBP, EUR, NGN)
      – AIOON ENERGY Ltd – 22 comptes (USD)
      – MITSUN CAPITAL Ltd – 31 comptes (multi-devises

    Ces biens et avoirs, identifiés dans leur nature, leur localisation et parfois leur mode de financement, feront l’objet de mesures de confiscation.

    IV- APPRÉCIATION MORALE, FINANCIÈRE ET SOCIALE DU PROCÈS

     

    Monsieur le Président,
    Mesdames et Messieurs de la Cour,

    Les deux accusés étaient membres de la famille présidentielle et bénéficiaient, à ce titre, d’un accès privilégié aux circuits de décision et d’exécution budgétaire.

    Les accusés n’ont pas agi par impulsion, mais par calcul.
    La création de dizaines de sociétés-écrans, l’usage de prête-noms, la coordination internationale via Dubaï, Londres et les BVI, traduisent une criminalité économique de haut niveau, organisée, instruite, internationale.

    Sur plus de dix ans, les mêmes circuits ont été entretenus, les mêmes personnes sollicitées, les mêmes sociétés recyclées.
    Ce n’est plus une infraction ponctuelle : c’est une méthode de gouvernement parallèle, une économie de l’ombre.

    Les accusés savaient pertinemment la nature publique des fonds et la gravité des actes. Ils ont agi en pleine conscience, avec la volonté d’échapper au contrôle de la loi et du peuple. Il n’y a ici ni erreur, ni ignorance : il y a volonté délibérée d’enrichissement illicite au détriment de la Nation.

    Derrière les comptes bancaires, les transferts et les SCI, il y a une blessure morale, une rupture de confiance, une trahison d’État.

    Les montants en cause dépassent l’entendement. Ce n’est pas seulement une atteinte au Trésor : c’est une saignée morale infligée à la République. Derrière les chiffres, il y a les hôpitaux sans moyens, les écoles sans toit, les salaires différés.

    Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO rappelle à bien des égards Léila Trabelsi, l’épouse de Ben Ali, l’ancien président de Tunisie. Epousées en secondes noces, ambitieuses, superficielles, avides d’argent et des jeux de pouvoir, elles étaient des “anges noirs pour leurs époux Ben Ali  et Ali Ben.

    Toutes deux, ont usé et abusé de leurs positions pour servir leurs intérêts privés. Toutes deux ont profité de leur influence pour obtenir des avantages indus, que ce soit pour elles-mêmes ou pour leurs proches, au mépris des lois et des règlements. 

    Elles se vautraient dans le luxe, déconnectées de la réalité, ignorantes des souffrances de leurs peuples comme Marie Antoinette, à Versailles et au Trianon, pendant que le peuple français mourait de faim et que la Révolution grondait.

    Pour se faire bonne conscience, elles ont créé des fondations comme Monsieur Jourdain faisait la prose, pour aider des citoyens qui, faute de droit à la santé, étaient condamnés à des soins médiocres.  

    Enfin, ces deux dévorantes, ont cherché à s’assurer de la pérennité de leur pouvoir, en essayant de favoriser des successions dynastiques.

    Ces deux ex-premières dames, qui avaient poussé leurs époux à faire le tri dans leur entourage immédiat, en écartant même les plus fidèles, symbolisent l’extravagance et les vertiges de deux règnes sans partage interrompus brutalement, l’un, par une révolte populaire et l’autre, par un coup de libéartion.

    Ce procès n’est pas un simple dossier de chiffres.
    C’est un miroir tendu à la conscience nationale.

    1. La portée morale : le parjure de la fonction publique

    La fonction publique n’est pas un privilège, c’est un serment.
    Un serment de loyauté, de probité et de service au peuple. Or ici, ce serment a été piétiné.Ce qui devait protéger la République l’a trahie.
    Ce qui devait veiller sur l’argent du peuple l’a pillé.
    Ce qui devait incarner l’État l’a vampirisé.

    La corruption n’a pas seulement appauvri les finances publiques : elle a perverti l’esprit de la République. Elle a fait d’un mandat un butin, d’un pouvoir un commerce, d’un État une entreprise familiale.
    C’est cela, Monsieur le Président, la gravité morale du crime que la Cour examine : non pas le détournement d’un budget, mais la désertion d’une conscience.

    Les inculpés n’ont pas agi dans la misère ou la nécessité ; ils ont agi dans le confort du pouvoir. Ils ont volé non pour vivre, mais pour régner — sur les apparences, sur le luxe, sur la misère qu’ils ont eux-mêmes créée. Et ce faisant, ils ont renié ce qu’il y a de plus sacré dans l’autorité publique : la responsabilité.

     

    1. La portée financière : la saignée d’une nation

    Les chiffres, ici, ne sont pas de simples abstractions comptables.
    Ce sont des cicatrices sur le visage de la République.
    Chaque milliard détourné, c’est un hôpital non bâti, une route jamais terminée, un enseignant non payé, un enfant non soigné.
    L’argent volé n’a pas disparu dans des coffres : il a été soustrait à la vie quotidienne du peuple.

    2 901 101 005 264 francs CFA de débits cumulés sur les comptes identifiés au Gabon.
    1  milliards de francs CFA 035localisés sur le fonds Robusto SPC aux Îles Caïmans.
    Soit un total avoisinant 2.902.136.005.264 milliards de francs CFA,l’équivalent d’une année de budget national moyen.

    À cela s’ajoutent 1 500 milliards de francs CFA d’actifs matériels — hôtels, avions, résidences, participations bancaires, mines, sociétés-écrans et comptes offshore —
    portant la valeur patrimoniale globale du préjudice à 4.402 milliards de francs CFA.

    Ces chiffres, pris isolément, seraient déjà vertigineux.
    Mais replacés dans le contexte du Gabon, ils deviennent indécents.

    Car 1 milliard de francs CFA, c’est le salaire annuel de plus de 1 000 enseignants,
    la réhabilitation de 10 écoles,
    la vaccination de 5 000 enfants,
    ou l’électrification de 30 villages.

    Alors, imaginez ce que représentent 4 402 milliards, le total monétaire avant investissement.

    Ce n’est plus du détournement : c’est un meurtre économique.
    Car quand des fonds publics disparaissent, ce ne sont pas seulement des comptes qui se vident — ce sont des vies qui s’éteignent.

    Le crime économique est un crime social. Il ne tue pas par arme, mais par abandon. Il ne saigne pas les corps, mais le pays.
    Il asphyxie les hôpitaux, il éteint les lampadaires, il vide les écoles.

     

    1. La portée sociale : la fracture et l’humiliation nationales

    Chaque page du dossier est un constat de dépossession :
    l’argent du contribuable transformé en luxe hédoniste,
    le patrimoine national converti en patrimoine familial,
    la sueur du peuple changée en marbre et en or.

    Et ce crime n’est pas un accident : il est systémique, organisé, prémédité.
    Le schéma financier n’était pas une dérive, mais un modèle :
    un modèle de prédation fondé sur l’accès au sommet de l’État et sur la confusion des genres.
    Les budgets spéciaux, les fonds présidentiels, les comptes d’opérations — tout a servi de caisse de transfert vers les sociétés privées de la famille.

    Cette logique, Mesdames et Messieurs de la Cour, a détruit la foi du citoyen dans l’État.
    Car comment croire encore à la justice, quand l’injustice a régné au sommet ?
    Comment croire à l’effort, quand l’impunité triomphe ?
    Comment enseigner la probité à un enfant, quand la corruption s’affiche en modèle de réussite ?

    Cette affaire a fracturé la société gabonaise entre ceux qui vivent du système et ceux qui en meurent.
    Mais aujourd’hui, la justice peut recoller les morceaux — non pas en effaçant le passé, mais en rétablissant la vérité.
    Car la vérité, ici, est le seul ciment capable de refonder la République.

     

    1. La dimension symbolique : la justice comme réparation nationale

    Depuis 2009, selon les données du Plan National de Développement Sanitaire (PNDS), le Gabon a consacré environ 100 milliards de francs CFA par an à la santé publique, soit 1 400 milliards sur 14 ans.

    Or, durant la même période, près de quatre fois ce montant a été détourné par un seul réseau.

    Pendant que nos hôpitaux manquaient de compresses,
    un Boeing 777 VIP décollait pour Genève.
    Pendant que les écoles rurales s’effondraient sous la pluie,
    un palace s’élevait à Marrakech. Pendant que les médecins attendaient leurs indemnités, des fonds de placement prospéraient à l’étranger.

    La corruption, lorsqu’elle atteint ce niveau, n’est plus une faute de gestion : c’est une trahison nationale. C’est la négation du contrat social, la perversion de l’autorité publique, la fracture de la foi républicaine.

     

    1. Le sens du procès : la justice comme ultime recours de la République

    Monsieur le Président,

    le peuple gabonais n’attend pas un miracle. Il attend une certitude : celle que la justice veille, celle que la République n’est pas à vendre,
    celle que la vérité finit toujours par remonter à la surface — comme l’or dans la rivière.

    Ces chiffres sont les témoins silencieux du crime.
    Ils parlent pour les écoles qui n’ont jamais vu le jour,
    pour les patients morts faute de soins,
    pour les jeunes diplômés sans emploi.
    Ils parlent pour le Gabon oublié.

    Et aujourd’hui, par votre verdict,
    la République peut enfin leur rendre la parole.

    V – REQUISITIONS SUR LA CULPABILITÉ ET LES PEINES :

    Monsieur le Président,
    Mesdames et Messieurs de la Cour,

    Nous arrivons au terme de ces débats.

    Ce qui est devant vous n’est pas une simple affaire de mauvaise gestion. C’est la démonstration que, pendant des années, la République gabonaise a été traitée comme un compte privé. Les pièces du dossier, illustrent que l’argent du peuple a été pris, recyclé, blanchi, réinvesti pour un luxe déconnecté de la réalité nationale.

    Les montants parlent :

    • 2 901 101 005 264 F CFA de débits cumulés sur les comptes identifiés au Gabon pour la seule période ultime,
    • 1 035.000.000 F CFA dans le fonds Robusto SPC aux Îles Caïmans,
    • auxquels il faut ajouter environ 1 500 milliards de F CFA d’actifs matériels (avions, hôtels, résidences, mines, participations).

    Nous sommes donc à minima devant 4.402 milliards de F CFA de richesse publique aspirée vers un patrimoine privé.

    Rapporté au temps, nous parlons de  :

    • près d’1 milliard de F CFA détourné chaque jour,
    • plus de 41 millions par heure,
    • près de 700 000 F CFA par minute,
    • 11 000 F CFA par seconde.

    Chaque seconde, c’était un morceau de souveraineté qui partait. C’est cela que la Cour est appelée à juger.

    Il s’agit d’un système de prédation financière d’une ampleur inédite. les accusés, instruits, expérimentés, dotés de pouvoirs et d’accès institutionnels, savaient ce qu’ils faisaient et ont agi en pleine connaissance de cause, dans la préméditation et l’impunité. 

    Il a été retrouvé 250 milliards dans un compte à BGFI appartenant à ALI et Sylvia BONGO. Meme Omar BONGO ONDIMBA n’avait pas autant d’argent sur un compte après 42 ans de pouvoir.

    1. Noureddin Bongo Valentin fut le centre nerveux du dispositif : ordonnateur de fait, superviseur des décaissements, instigateur des montages et bénéficiaire principal des flux ;
      Qu’il doit être déclaré coupable :
    • de détournement de deniers publics (art. 141 CP) ;
    • de concussion (art. 127 CP) ;
    • d’usurpation de titre et de fonction (art. 165 CP) ;
    • de blanchiment aggravé de capitaux (art. 380 CP) ;
    • et d’association de malfaiteurs (art. 193 et 194 CP).

    Mme Sylvie Aimée Marie Valentin épouse Bongo Ondimba a organisé la phase de réception, de dissimulation et d’intégration ; qu’elle doit être déclarée coupable :

    • de recel de détournement de fonds publics (art. 312 CP) ;
    • et de blanchiment aggravé de capitaux (art. 380 CP).

    Leur alliance, l’un dans l’action, l’autre dans la structure, a formé un tout indivisible : un réseau familial de captation d’État.

    Monsieur le Président,

    Mesdames et Messieurs,

    La Cour criminelle spécialisée ne juge pas ici une simple infraction économique ; qu’elle juge une atteinte au contrat social, un crime d’État commis contre la confiance publique ;
    qu’en conséquence, le verdict attendu doit être exemplaire, restaurateur et dissuasif, non par vengeance mais pour reconstruire la foi républicaine.

     

    Le ministère public requiert qu’il plaise à la Cour criminelle spécialisée, siégeant en matière de criminalité économique et financière, en procédure de contumace, de :

    A- Déclarer coupable Monsieur Noureddin BONGO VALENTIN:

    1. Du crime de détournement de fonds publics,;
    2. Du délit de concussion ;
    3. Du délit d’usurpation de titre et de fonction;
    4. Du délit de blanchiment de capitaux aggravé;
    5. Du délit d’association de malfaiteurs 
    1. Déclarer coupable Madame Sylvie Aimée Marie VALENTIN épouse BONGO:
    1. Du crime de recel de détournement de fonds publics;
    2. Du délit de blanchiment de capitaux aggravé.

    C- Condamner :

    • M. Noureddin Bongo Valentin et Mme Sylvie Aimée Marie Valentin épouse Bongo Ondimba à 20 ans de réclusion peine criminelle et à 100.000.000 de FCFA d’amende;
    • Les condamner à l’interdiction définitive de gérer toute structure recevant des fonds publics ou parapublics.

    D- Ordonner la restitution des SCI TERCEIRA et BLU RIVAGE à leurs gérants-fondateurs respectifs ;

    Ordonner la confiscation intégrale, au profit de l’État gabonais de tous les biens, avoirs et instruments ayant servi ou résulté des infractions sus visées soit:

    • tous les comptes bancaires identifiés aux chapitres précédents ; 


    • Les biens meubles et immeubles tels que :
    • 1. Les aéronefs
    • 2. Les actifs hôteliers et immobiliers

    L’Hôtel Onomo,

    Le Complexe Mayena,

    L’Hôtel Radisson Blu,

    L’Hôtel Gamba.

    • 3. Les Actifs pétroliers et miniers suivants :

    Le champ pétrolier Sardine et Olowi.

    La société Noga Mining 

    4 les actifs à Delta Synergie, Ceca-Gadis et BGFI Holding Corporation ;

    • 5. Les biens immobiliers et résidences privées

    Un palace sis à Charles Street, Mayfair (Londres), accompagné de deux appartements sis dans le même quartier;

    Un palace à Marrakech (Maroc), d’une valeur estimée à 70 milliards de F CFA ;

    La résidence dite “NAM”, située à Libreville, d’une valeur évaluée à 80 milliards de F CFA, édifiée sur des fonds détournés de la Présidence de la République.

    • les parts sociales et titres financiers détenus dans les structures suivantes, hors exclusion expresse indiquée :

     

    À l’étranger :

    1. La Société Shanah Investments Ltd immatriculée au Royaume Uni 
    2. La société Loup Limited enregistrée au Royaume Uni
    3. La société Lekoni Limited immatriculée au Royaume Uni
    4. La société M 9 Investment Limited immatriculée au Royaume Uni
    5. Société Crystal Springs Management LTD immatriculée aux Iles Vierges Britanniques qui porte la résidence de Londres, reconnue par Mme Valentin comme structure de détention
    6. La société Téké Ltd immatriculée au Royaume Uni
    7. La société Lewaï Ltd enregistrée au Royaume Uni
    8. La société Mykasa Ltd immatriculée au Royaume Uni
    9. La société Artesia Holdings FZE enregistrée aux Emirats Arabes Unis
    10. La société Lewaï Investment immatriculée aux Emirats Arabes Unis
    11. Atelier VALENTIN BOUVET
    12. Société Lemaire Tricofel
    13. St Groupe
    14. Cabinet d’Architecture Saoti Pty
    15. DS Logistic
    16. Société Morgan Mallet
    17. Maison Tirel
    18. De Salvano Del Bene
    19. Cercle Rouge SA
    20. Agencement Paul Champs
    21. Ferndale Pharmaceuticals Ltd
    22.  Artesia Holding FZE
    23. Lewaï Investment FZE

    Et toutes structures assimilées.

     

    Au Gabon :

      1. SCI Martin-Pêcheur :.
      2. SCI Sable — 
      3. SCP Yssia 
      4. SCI Stellar — 
      5. SCI Athena I — 
      6. SCI West 1 Jay.
      7. SCI Pegasus —.
      8. SCI Ambowe Nomba — 
      9. SCI Mars —.
    • SCI Nourra —.
      1. SCI Lilya —.
    • SCI Africa Dream.
    • SCI Elysea — 
      1. SCI Tellus II —.
      2. SCI Valbona —.
      3. SCI Green Equator.
      4. SCI Paradic —
      5. École Ruban Vert — 
      6. Société SANA Investments —
      7. Société GERI —.
      8. Société Nine Engineering —.
    • EQUARIUS SA —
    1. CAPELA SA —.
    2. Alpha Centauri Mining SA 

     

    E- Condamner solidairement les accusés à rembourser à l’État gabonais, à titre de dommages-intérêts civils, la somme  de 4.402 000 000 000 F CFA.

     

    Mais, Monsieur le Président,
    au-delà des peines, il y a la symbolique.
    Ce verdict ne sera pas un châtiment : il sera une délivrance.
    Car la justice, lorsqu’elle s’élève contre la corruption,
    n’est pas la vengeance des hommes : elle est la mémoire de la République.

    Aujourd’hui, vous avez la possibilité de réparer l’humiliation subie par le peuple gabonais, de dire à l’Histoire que plus jamais l’État ne sera pris en otage, de rendre à ce pays sa fierté, sa dignité et sa foi en lui-même.

    Ce jugement ne concerne pas seulement deux noms : il concerne des générations entières. Il dira à nos enfants que le Gabon a connu la faute,
    mais qu’il a su se relever.

    Alors, au nom du peuple gabonais,
    au nom des travailleurs qui se lèvent tôt,
    au nom des jeunes qui espèrent,
    au nom des anciens qui ont tout donné à cette terre,
    le ministère public vous le dit avec gravité et respect :

    Rendez la justice.
    Pas une justice de surface, mais une justice d’exemple.
    Une justice qui ne tremble pas devant les puissants.
    Une justice qui répare, qui réconcilie, qui reconstruit.
    Que la loi s’applique,
    sans haine mais sans faiblesse.
    Que la République se relève,
    sans orgueil mais sans complaisance.
    Et que le verdict de ce jour fasse trembler jusqu’aux fondations de la corruption.

    Car ce jour, Monsieur le Président,
    ce jour où la justice du Gabon aura frappé à la porte de l’Histoire,
    sera celui où, enfin,
    la République aura retrouvé son nom, son âme et son honneur.

    Je vous remercie.

    Share. Facebook Twitter LinkedIn Email WhatsApp
    Gabon 24
    Gabon 24
    • Website

    ARTICLE(S) SIMILAIRE(S)

    Procès Bongo Valentin : fin des auditions au sixième jour d’audience

    15 novembre 2025

    Gabon : 18 membres du gouvernement démissionnent, neuf ministres assurent l’intérim dans l’attente du remaniement

    15 novembre 2025

    Auditions sous haute tension : révélations en cascade dans l’affaire Bongo Valentin

    14 novembre 2025

    COMMENTAIRE Annuler

    Articles récent

    Gabon : COMILOG enregistre un chiffre d’affaires de 926 milliards de FCFA

    19 juin 20234 286

    Le Gabon, numéro 1 en matière de promotion des droits de la femme

    24 avril 20232 189

    Gabon : Denis Bouanga, 7ème meilleur buteur de l’année 2023

    8 janvier 20241 989

    GABON : Jaquou le Bantou en finale du concours RFI Talents du rire 2023

    12 décembre 20231 763
    Suivez-nous
    • Facebook
    • Twitter
    • Instagram
    • YouTube
    • LinkedIn
    • WhatsApp
    À propos de nous
    À propos de nous

    Gabon 24 est une chaîne d’information en continu diffusée au Gabon sur les bouquets satellite Canal + Afrique et Satcon. Elle est également disponible dans de nombreux pays du continent africain et en Europe.

    Facebook Twitter YouTube WhatsApp TikTok
    A LA UNE

    Procès Bongo Valentin : fin des auditions au sixième jour d’audience

    15 novembre 2025

    Gabon : 18 membres du gouvernement démissionnent, neuf ministres assurent l’intérim dans l’attente du remaniement

    15 novembre 2025

    Auditions sous haute tension : révélations en cascade dans l’affaire Bongo Valentin

    14 novembre 2025
    MONDE

    Gabon : les particularités de la nouvelle Carte d’identité nationale électronique (CNIE)

    25 février 202532 683

    Gabon : interview exclusive avec Gabriella, 8 ans à peine elle obtient  16,33 au 1er trimestre

    1 février 202427 328

    Grand Libreville : la SEEG dévoile un planning de délestages rotatifs

    4 septembre 202418 933

    Type above and press Enter to search. Press Esc to cancel.