Au Gabon, l’éducation sexuelle des adolescents et des jeunes adultes reste un enjeu majeur de santé publique. Malgré les campagnes de sensibilisation, l’usage du préservatif, principal moyen de protection contre les infections sexuellement transmissibles (IST) et les grossesses non désirées, reste irrégulier, suscitant inquiétude et débats.
Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes couples abandonnent le préservatif après les premiers mois de leur relation. Si ce choix traduit un sentiment de confiance et d’intimité, il expose néanmoins les partenaires à des risques importants.
« Dans les débuts d’une relation, le préservatif est perçu comme nécessaire, mais avec le temps, les jeunes estiment qu’ils se connaissent suffisamment pour se passer de protection », explique le Dr. Sandra Mavoungou, spécialiste en santé reproductive. « Cette décision, basée sur la confiance, peut malheureusement conduire à des infections sexuellement transmissibles (IST) ou à des grossesses non désirées », a-t-elle renchéri.
Cette tendance reflète un paradoxe : la sécurité ressentie dans la relation masque les risques réels. Le VIH, la chlamydia, la gonorrhée et d’autres infections peuvent s’installer sans signes immédiats, mettant les deux partenaires en danger. Les spécialistes soulignent que cette pratique est souvent liée à un déficit d’éducation sexuelle. « Les jeunes manquent parfois de connaissances sur la nécessité d’un usage régulier du préservatif, même dans une relation stable », ajoute le Dr Mavoungou. « Ils ignorent que la confiance n’élimine pas le risque de contamination, surtout lorsque l’historique sexuel du partenaire n’est pas connu ».
Dans certains milieux, le préservatif demeure associé à l’infidélité ou à la méfiance. Les femmes, en particulier, racontent leur difficulté à négocier l’usage du préservatif, sous peine d’être accusées de cacher une double vie. Une pression affective qui laisse peu de place à la prévention. « Il m’a dit qu’utiliser un préservatif, c’était comme s’il pensait que je le trompais », confie Stéphanie, une compatriote. Comme beaucoup, elle a fini par céder.
Et pour d’autres, l’abandon du préservatif n’est pas seulement symbolique : il est aussi lié au plaisir et aux sensations. « Je préfère avoir des rapports sans préservatif, parce que je veux ressentir le goût, sentir la peau de ma partenaire », confie un jeune homme sous anonymat.
Les motivations, combinées à la confiance dans la relation, peuvent conduire à minimiser les risques, alors même que les conséquences peuvent être graves. Dans les centre de prises en charge spécialisées dans la prise en charge du VIH, le constat est le même, de nombreux cas d’infections surviennent au sein même de couples dits stables.
« La majorité des nouvelles contaminations provient de personnes en relation, pas d’aventures ponctuelles », affirme Morel Ontsila, psychologue clinicien. Une idée qui s’explique par la croyance tenace que le préservatif est réservé aux relations occasionnelles, et que l’amour véritable justifie son abandon.
Les experts insistent, il ne s’agit pas de culpabiliser les couples, mais de promouvoir une démarche saine et transparente. Trois gestes simples : « faire un dépistage ensemble, discuter ouvertement des risques, choisir une méthode de prévention adaptée (préservatif, PrEP, suivi médical) ». Une approche respectueuse, fondée sur la santé et la communication, qui permet de préserver le couple sans compromettre la sécurité.
Derrière l’idée romantique que l’amour immunise, se cache un danger réel. La confiance est essentielle dans une relation, mais elle ne dispense pas de prudence. Au contraire, un couple solide, disent les professionnels, est celui qui peut parler sans tabous de sa santé sexuelle, parce que si l’amour est une force, le VIH, lui, ne fait aucune exception.

