C’est une décision qui rebat les cartes dans les rapports frontaliers entre le Gabon et la Guinée équatoriale. Dans son arrêt rendu ce 19 mai 2025, la Cour internationale de Justice (CIJ) a donné raison au Gabon sur l’un des volets les plus sensibles du différend : celui du tracé de la frontière terrestre.
La Cour a jugé que le seul fondement juridique valable pour fixer la frontière terrestre entre les deux pays est la Convention franco-espagnole signée le 27 juin 1900. Ce traité colonial, conclu entre les puissances administrantes de l’époque, fixait une ligne droite délimitant leurs zones d’influence en Afrique centrale. La CIJ a estimé que ce document répond aux exigences du droit international et reste applicable en vertu du principe de l’uti possidetis juris, selon lequel les frontières héritées de la colonisation doivent être respectées à l’indépendance des États.
Par conséquent, la Cour a rejeté l’argument longtemps soutenu par la Guinée équatoriale selon lequel la frontière terrestre serait matérialisée par la rivière Kyé. Selon les juges de La Haye, cette ligne fluviatile ne possède aucune valeur juridique, car elle ne repose sur aucun titre formellement reconnu par les deux États.
Des implications territoriales concrètes pour le Gabon
Cette décision n’est pas que symbolique. En redonnant pleine valeur juridique à la Convention de 1900, la CIJ redessine de facto certaines portions de la frontière terrestre. Plusieurs zones actuellement administrées par la Guinée équatoriale, notamment dans l’environnement immédiat des villes de Ebebiyin et Mongomo, devraient désormais être reconnues comme faisant partie intégrante du territoire gabonais.
Si la matérialisation concrète de cette décision reste à organiser entre les deux pays, ce jugement constitue une victoire diplomatique et juridique pour Libreville sur ce volet du contentieux.
Il revient désormais aux autorités gabonaises et équato-guinéennes de coopérer pour mettre en œuvre pacifiquement cette délimitation, dans le respect de la souveraineté de chacun. Une mission technique conjointe pourrait être requise pour procéder aux opérations de terrain et redéfinir physiquement les bornes frontalières, sous supervision internationale si nécessaire.
Dans un contexte régional où les tensions frontalières peuvent dégénérer, la décision de la CIJ vient rappeler le rôle fondamental du droit international comme outil de règlement pacifique des différends, et non comme source de division.