Bien que cela ne cadre pas avec les us et coutumes des sociétés bantoues, les abandons familiaux sont malheureusement devenus fréquents dans la société gabonaise. Lorsque la vieillesse frappe à la porte des aînés et qu’ils deviennent plus vulnérables, il arrive parfois que leurs proches les laissent sombrer dans l’oubli, les abandonnant à leur triste sort.
Cette situation est non seulement tragique, mais aussi moralement répréhensible. Jadis, ces personnes étaient aux petits soins pour leurs proches : elles ont fondé des familles, élevé des enfants, bâti des foyers et travaillé avec acharnement toute leur vie pour le bien-être de leurs descendants. Malheureusement, avec l’avènement du modernisme, de nombreuses personnes âgées se retrouvent livrées à elles-mêmes, murées dans le silence et l’indifférence de leur entourage.
« Il y a une augmentation des cas d’abandon familial chez les personnes âgées, souvent liée à des changements sociaux et familiaux », a déclaré Mouvangui Paulette Marcelle, cheffe du service de Gérontologie à l’hôpital régional de Melen. Ces aînés sont de plus en plus confrontés à une forme cruelle d’exclusion sociale : l’abandon familial. Ce phénomène, aussi discret que douloureux, prend de l’ampleur au sein de certaines familles gabonaises.
Dans les centres de gérontologie-gériatrie, les hôpitaux ou même à leurs domiciles, de nombreuses personnes âgées passent des jours, des semaines, voire des mois sans une seule visite. « Les principales raisons pour lesquelles les familles coupent les liens incluent le stress financier, des conflits familiaux, le manque de temps, et parfois des problèmes de santé mentale ou de dépendance », a révélé Mouvangui Paulette. La vieillesse s’accompagne souvent de divers problèmes de santé, de pertes de mémoire et d’une dépendance accrue. Les causes de cet abandon sont multiples : rythmes de vie effrénés, éloignement géographique, conflits familiaux, voire simple négligence.
« Des facteurs sociaux comme l’isolement, la crise économique et l’absence de soutien de la communauté aggravent ce phénomène », a-t-elle renchéri. Mais derrière ces causes se cache un problème plus profond : la place accordée aux aînés dans notre société. Alors que, traditionnellement, dans les cultures gabonaises, les personnes âgées sont perçues comme des piliers et des gardiens de la mémoire, elles semblent aujourd’hui souvent reléguées au second plan.
La multiplication des faux guides religieux sur le territoire national a grandement contribué à l’abandon des anciens. Les conflits familiaux se règlent désormais parfois à coups de consultations prophétiques chez des individus peu scrupuleux ou d’initiations aux rites traditionnels auprès de personnes aux motivations douteuses, qui privilégient leurs propres intérêts au détriment du bien-être de leurs adeptes.
« Un nganga a dit à mon fils que s’il ne trouvait toujours pas d’emploi depuis l’obtention de ses diplômes, c’est parce que je « travaillais » avec ses diplômes dans le monde astral. C’est la raison pour laquelle il a coupé tout contact avec moi », a témoigné Pondou Edgar, retraité de 79 ans. Des récits comme celui-ci, il y en a des dizaines, tous plus déchirants les uns que les autres, et qui mettent en lumière une vérité dérangeante.
« Depuis que ma fille a quitté le domicile familial sur les consignes de son pasteur en janvier, je n’ai plus eu de nouvelles d’elle », a révélé Ernestine Angoué, 68 ans, résidant à Nkembo. Les personnes âgées ont besoin de soutien, de soins et d’amour de la part de leur famille. Cependant, il arrive que certains membres choisissent de les abandonner, les laissant seuls et démunis. « Les répercussions psychologiques peuvent inclure la dépression, l’anxiété et le sentiment d’abandon, tandis que les effets physiques peuvent consister en des maladies aggravées par la négligence des soins », a précisé Mouvangui Paulette. Cet abandon n’est pas sans conséquences pour ces personnes, qui subissent de multiples bouleversements physiques et psychologiques.
Les personnes âgées abandonnées peuvent se sentir isolées, déprimées et dévalorisées, même lorsqu’elles sont entourées de leur famille, car très souvent, cette dernière n’est présente que pour la forme et ne contribue en rien à leur bien-être. « Les signes d’abandon chez une personne âgée peuvent inclure une négligence dans les soins, une perte de poids, un manque d’interaction sociale, des conditions de vie insalubres et des problèmes de santé non traités », a souligné la professionnelle de santé.
Elles peuvent également être confrontées à des difficultés financières, sanitaires et sécuritaires. Il est important de sensibiliser le public à cette question et de prendre des mesures pour prévenir l’abandon familial des personnes âgées. « Il serait essentiel de prévoir des actions de sensibilisation, des visites aux personnes âgées isolées et des programmes de soutien pour renforcer les liens familiaux et communautaires », a insisté Mme Mouvangui. Les autorités gabonaises, les organisations caritatives et la population dans son ensemble doivent mettre en place des initiatives pour les aînés vulnérables, afin de s’assurer qu’ils reçoivent l’aide dont ils ont besoin.
L’abandon familial des personnes âgées est un problème grave qui nécessite une action immédiate. Il est essentiel que la société accorde plus d’attention et de soins à ses aînés et que chaque famille veille à ce qu’ils ne soient pas laissés dans l’oubli. L’amour et le respect envers les personnes âgées sont des valeurs fondamentales qui doivent être défendues et encouragées au sein de la société gabonaise.
